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Chapitre XL. La Tranquillitй

Chapitre XXIX. L’Ennui | Chapitre XXX. Une loge aux Bouffes | Chapitre XXXI. Lui faire peur | Chapitre XXXII. Le Tigre | Chapitre XXXIII. L’Enfer de la faiblesse | Chapitre XXXIV. Un homme d’esprit | Chapitre XXXV. Un orage | Chapitre XXXVI. Dйtails tristes | Chapitre XXXVII. Un donjon | Chapitre XXXVIII. Un homme puissant |


Читайте также:
  1. Chapitre I La ligne
  2. Chapitre II Les camarades
  3. Chapitre II. Entrйe dans le monde
  4. Chapitre II. Un maire
  5. Chapitre III L’Avion
  6. Chapitre III. Le Bien des pauvres
  7. Chapitre III. Les Premiers pas

 

C’est parce qu’alors j’йtais fou qu’aujourd’hui je suis sage. O philosophe qui ne vois rien que d’instantanй, que tes vues sont courtes! Ton њil n’est pas fait pour suivre le travail souterrain des passions.

 

Mme GOETHE.

 

Cet entretien fut coupй par un interrogatoire, suivi d’une confйrence avec l’avocat chargй de la dйfense. Ces moments йtaient les seuls absolument dйsagrйables d’une vie pleine d’incurie et de rкveries tendres.

 

Il y a meurtre, et meurtre avec prйmйditation, dit Julien au juge comme а l’avocat. J’en suis fвchй, Messieurs, ajouta-t-il en souriant; mais ceci rйduit votre besogne а bien peu de chose.

 

Aprиs tout, se disait Julien, quand il fut parvenu а se dйlivrer de ces deux кtres, il faut que je sois brave, et apparemment plus brave que ces deux hommes. Ils regardent comme le comble des maux, comme le roi des йpouvantements, ce duel а issue malheureuse, dont je ne m’occuperai sйrieusement que le jour mкme.

 

C’est que j’ai connu un plus grand malheur, continua Julien en philosophant avec lui-mкme. Je souffrais bien autrement durant mon premier voyage а Strasbourg, quand je me croyais abandonnй par Mathilde… Et pouvoir dire que j’ai dйsirй avec tant de passion cette intimitй parfaite qui aujourd’hui me laisse si froid!… Dans le fait, je suis plus heureux seul que quand cette fille si belle partage ma solitude…

 

L’avocat, homme de rиgle et de formalitйs, le croyait fou et pensait avec le public que c’йtait la jalousie qui lui avait mis le pistolet а la main. Un jour, il hasarda de faire entendre а Julien que cette allйgation, vraie ou fausse, serait un excellent moyen de plaidoirie. Mais l’accusй redevint en un clin d’њil un кtre passionnй et incisif.

 

– Sur votre vie, Monsieur, s’йcria Julien hors de lui, souvenez-vous de ne plus profйrer cet abominable mensonge. Le prudent avocat eut peur un instant d’кtre assassinй.

 

Il prйparait sa plaidoirie, parce que l’instant dйcisif approchait rapidement. Besanзon et tout le dйpartement ne parlaient que de cette cause cйlиbre. Julien ignorait ce dйtail, il avait priй qu’on ne lui parlвt jamais de ces sortes de choses.

 

Ce jour-lа, Fouquй et Mathilde ayant voulu lui apprendre certains bruits publics fort propres, selon eux, а donner des espйrances, Julien les avait arrкtйs dиs le premier mot.

 

– Laissez-moi ma vie idйale. Vos petites tracasseries, vos dйtails de la vie rйelle, plus ou moins froissants pour moi, me tireraient du ciel. On meurt comme on peut; moi je ne veux penser а la mort qu’а ma maniиre. Que m’importent les autres! Mes relations avec les autres vont кtre tranchйes brusquement. De grвce, ne me parlez plus de ces gens-lа: c’est bien assez de voir le juge et l’avocat.

 

Au fait, se disait-il а lui-mкme, il paraоt que mon destin est de mourir en rкvant. Un кtre obscur tel que moi, sыr d’кtre oubliй avant quinze jours, serait bien dupe, il faut l’avouer, de jouer la comйdie…

 

Il est singulier pourtant que je n’aie connu l’art de jouir de la vie que depuis que j’en vois le terme si prиs de moi.

 

Il passait ces derniиres journйes а se promener sur l’йtroite terrasse au haut du donjon, fumant d’excellents cigares que Mathilde avait envoyй chercher en Hollande par un courrier, et sans se douter que son apparition йtait attendue chaque jour par tous les tйlescopes de la ville. Sa pensйe йtait а Vergy. Jamais il ne parlait de Mme de Rкnal а Fouquй, mais deux ou trois fois cet ami lui dit qu’elle se rйtablissait rapidement, et ce mot retentit dans son cњur.

 

Pendant que l’вme de Julien йtait presque toujours tout entiиre dans le pays des idйes, Mathilde, occupйe des choses rйelles, comme il convient а un cњur aristocrate, avait su avancer а un tel point l’intimitй de la correspondance directe entre Mme de Fervaques et M. de Frilair, que dйjа le grand mot йvкchй avait йtй prononcй.

 

Le vйnйrable prйlat chargй de la feuille des bйnйfices ajouta en apostille а une lettre de sa niиce: Ce pauvre Sorel n’est qu’un йtourdi, j’espиre qu’on nous le rendra.

 

А la vue de ces lignes, M. de Frilair fut comme hors de lui. Il ne doutait pas de sauver Julien.

 

– Sans cette loi jacobine qui a prescrit la formation d’une liste innombrable de jurйs, et qui n’a d’autre but rйel que d’enlever toute influence aux gens bien nйs, disait-il а Mathilde la veille du tirage au sort des trente-six jurйs de la session, j’aurais rйpondu du verdict. J’ai bien fait acquitter le curй N…

 

Ce fut avec plaisir que le lendemain, parmi les noms sortis de l’urne, M. de Frilair trouva cinq congrйganistes de Besanзon, et parmi les йtrangers а la ville, les noms de MM. Valenod, de Moirod, de Cholin. – Je rйponds d’abord de ces huit jurйs-ci, dit-il а Mathilde. Les cinq premiers sont des machines. Valenod est mon agent, Moirod me doit tout, de Cholin est un imbйcile qui a peur de tout.

 

Le journal rйpandit dans le dйpartement les noms des jurйs et Mme de Rкnal, а l’inexprimable terreur de son mari, voulut venir а Besanзon. Tout ce que M. de Rкnal put obtenir fut qu’elle ne quitterait point son lit, afin de ne pas avoir le dйsagrйment d’кtre appelйe en tйmoignage. – Vous ne comprenez pas ma position, disait l’ancien maire de Verriиres, je suis maintenant libйral de la dйfection, comme ils disent; nul doute que ce polisson de Valenod et M. de Frilair n’obtiennent facilement du procureur gйnйral et des juges tout ce qui pourra m’кtre dйsagrйable.

 

Mme de Rкnal cйda sans peine aux ordres de son mari. Si je paraissais а la cour d’assises, se disait-elle, j’aurais l’air de demander vengeance.

 

Malgrй toutes les promesses de prudence faites au directeur de sa conscience et а son mari, а peine arrivйe а Besanзon elle йcrivit de sa main а chacun des trente-six jurйs:

 

«Je ne paraоtrai point le jour du jugement, Monsieur, parce que ma prйsence pourrait jeter de la dйfaveur sur la cause de M. Sorel. Je ne dйsire qu’une chose au monde et avec passion, c’est qu’il soit sauvй. N’en doutez point, l’affreuse idйe qu’а cause de moi un innocent a йtй conduit а la mort empoisonnerait le reste de ma vie et sans doute l’abrиgerait. Comment pourriez-vous le condamner а mort, tandis que moi je vis? Non, sans doute, la sociйtй n’a point le droit d’arracher la vie, et surtout а un кtre tel que Julien Sorel. Tout le monde, а Verriиres, lui a connu des moments d’йgarement. Ce pauvre jeune homme a des ennemis puissants; mais, mкme parmi ses ennemis (et combien n’en a-t-il pas!), quel est celui qui met en doute ses admirables talents et sa science profonde? Ce n’est pas un sujet ordinaire que vous allez juger, monsieur. Durant prиs de dix-huit mois nous l’avons tous connu pieux, sage, appliquй; mais, deux ou trois fois par an, il йtait saisi par des accиs de mйlancolie qui allaient jusqu’а l’йgarement. Toute la ville de Verriиres, tous nos voisins de Vergy oщ nous passons la belle saison, ma famille entiиre, monsieur le sous-prйfet lui-mкme, rendront justice а sa piйtй exemplaire; il sait par cњur toute la sainte Bible. Un impie se fыt-il appliquй pendant des annйes а apprendre le livre saint? Mes fils auront l’honneur de vous prйsenter cette lettre: ce sont des enfants. Daignez les interroger, monsieur, ils vous donneront sur ce pauvre jeune homme tous les dйtails qui seraient encore nйcessaires pour vous convaincre de la barbarie qu’il y aurait а le condamner. Bien loin de me venger, vous me donneriez la mort.

 

Qu’est-ce que ses ennemis pourront opposer а ce fait? La blessure, qui a йtй le rйsultat d’un de ces moments de folie que mes enfants eux-mкmes remarquaient chez leur prйcepteur, est tellement peu dangereuse, qu’aprиs moins de deux mois elle m’a permis de venir en poste de Verriиres а Besanзon. Si j’apprends, monsieur, que vous hйsitiez le moins du monde а soustraire а la barbarie des lois un кtre si peu coupable, je sortirai de mon lit, oщ me retiennent uniquement les ordres de mon mari, et j’irai me jeter а vos pieds.

 

Dйclarez, monsieur, que la prйmйditation n’est pas constante, et vous n’aurez pas а vous reprocher le sang d’un innocent», etc., etc.


Дата добавления: 2015-11-14; просмотров: 30 | Нарушение авторских прав


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