La poésie

Durant le XVII e s. la fortune du genre poétique subit une évolution marquée. Jusqu’au milieu du XVII e s., la poésie fleurit. Elle connaît alors de nombreux registres et tonalités: tandis que Malherbe et ses disciples s’efforcent à une simplicité déjà classique, d’autres auteurs ne dédaignent pas les excès baroques, donnent dans la préciosité ou cultivent le burlesque. A l’inspiration lyrique s’ajoutent par ailleurs la veine religieuse, la veine épique et la veine satirique. Mais bientôt, le triomphe de la raison rend suspects les poètes accusés de trop s’abandonner à leur imagination. Ils deviennent des personnages ridicules que les comédies brocardent cruellement. Dès lors, l’écriture poétique se réfugie dans les pièces de théâtre que l’on appelle, de façon significative, poèmes dramatiques. Au théâtre la poésie est représentée par le genre élevé de la tragédie, P. Corneille, J. Racine en sont les grands maîtres. A la différence des écrivains du XVI e s. dont les œuvres abondent en synonymes, les classiques utilisent un vocabulaire poétique restreint.

Malgré cette décadence du genre en tant que tel, deux noms émergent néanmoins durant la seconde partie du XVII e s.: La Fontaine (1621 – 1695) qui pratique le genre moral, en principe dépersonnalisé, de la fable et Boileau (1636 – 1711) orienté vers le didactisme. Il faudra attendre la seconde partie du XVIII e s. pour voir enfin l’idée poétique reprendre vigueur.

Les changements de structure politique et sociale au siècle des Lumières (XVIII e s.)

Le siècle des Lumières (XVIII e s.) se caractérise, d’une part, par l’établissement d’une plus grande tolérance et, d’autre part, par l’affaiblissement de la monarchie, suivi de la fin de la suprématie française en Europe et du début de la prépondérance anglaise.

La situation politique et sociale tend à se modifier en France et ailleurs en Europe en ce début du XVIIIe s. Sur le plan intérieur, la situation financière devient catastrophique sous les règnes du régent Philippe d’Orléans, de Louis XV et de Louis XVI; ces rois faibles, aux prises avec un régime de fêtes et d’intrigues de cour, ne peuvent faire face aux difficultés financières croissantes, qui aboutiront à l’impasse et susciteront la haine du peuple envers la monarchie.

Parallèlement, la bourgeoisie riche et aisée poursuit son ascension irréversible, devient une force politique et s’exprime publiquement. La monarchie et la noblesse ne sont plus qu’une façade sans crédibilité. Le règne de la bourgeoisie financière, commerçante et manufacturière commence. Le prestige de la Cour s’étant affaibli, sa langue n’est plus le modèle à suivre dans la société française.

Sur le plan extérieur, la royauté tente sans succès de poursuivre ses luttes contre l’Angleterre, la Prusse et l’Autriche. La France n’intervient plus en Europe et, après avoir perdu son empire colonial au Canada (1763), elle finit par être écartée de la scène internationale au profit de l’Angleterre, qui accroît sa richesse économique et sa prépondérance grâce à la maîtrise des mers et à sa puissance commerciale.

Au XVIIIe s., on assiste au commencement du capitalisme, au développement du commerce, au début de l’industrialisation, à un engouement pour les sciences, à la découverte de nouvelles techniques, à des inventions de toutes sortes, à l’amélioration de la médecine et à l’adoption d’une meilleure alimentation. Cette atmosphère de progrès matériels modifie profondément les valeurs de la société. Les philosophes rationalistes et les écrivains de premier plan se rendent indépendants de la royauté et de l’Église; de grands seigneurs pactisent avec les représentants des idées nouvelles et n’hésitent pas à les protéger contre la police associée aux forces conservatrices. Fait nouveau, la lutte des idées est dirigée surtout contre l’Église et la religion catholique elle-même; on combat en faveur de la tolérance au nom de la raison. C’est une période des «penseurs», le mouvement des idées prend de l’ampleur avec, au centre, la notion de la raison qui anime l’étude de la langue et l’activité littéraire de l’époque. Les plus illustres «penseurs» de l’époque sont Voltaire, Ch. Montesquieu, J.-J. Rousseau, D. Diderot, P.-A. Beaumarchais, et d’autres.

Les journaux scientifiques, techniques et politiques se développent, se multiplient rapidement et sont diffusés jusque dans les provinces, alimentant la soif de lecture chez un public de plus en plus étendu et sensibilisé au choc des idées. Le développement de la presse est à la fois la conséquence et la cause de cette curiosité générale, ainsi que de la contestation qui se répand graduellement dans la société. Vers le milieu du siècle, paraît même une littérature de type populacier, dite «poissarde» (par analogie avec les marchands de poissons des Halles), destinée aux gens du peuple. Tous ces faits contribuent au mouvement de révolte qui explose en 1789.

Le XVIII e s. continue les traditions du français classique. Précurseur de la Révolution bourgeoise, le «siècle des Lumières» est l’époque de la grande montée de la bourgeoisie. Cette dernière, surtout sa couche la plus aisée aspire à réformer l’ancien régime, tout en conservant son arme la plus efficace et bien aiguisée, la langue, qu’elle polit et perfectionne.

Дата добавления: 2015-08-03