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Particules йlйmentaires et forces de la nature

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Pour Aristote, toute la matiиre dans l’univers йtait composйe de quatre йlйments de base, la terre, l’air, le feu et l’eau. Ces йlйments йtaient animйs par deux forces: la gravitй, tendance pour la terre et l’eau а couler, et la lйgиretй, tendance pour l’air et le feu а s’йlever. Cette rйpartition des contenus de l’univers entre matiиre et forces est toujours en usage aujourd’hui.

Aristote croyait aussi que la matiиre йtait continue, c’est-а-dire que l’on pouvait diviser un bout de matiиre en morceaux de plus en plus petits, а l’infini: on ne pourrait jamais tomber sur un grain de matiиre qui ne pourrait plus кtre divisй. Quelques Grecs, cependant, comme Dйmocrite, tenaient que la matiиre йtait granuleuse en soi et que tout йtait fait d’un grand nombre de diffйrentes sortes d’atomes. (Le mot atome signifie «insйcable» en grec). Pendant des siиcles, la controverse continua sans aucune preuve rйelle ni d’un cфtй ni de l’autre. Mais en 1803, le chimiste et physicien britannique John Dalton fit remarquer que le fait que les composйs chimiques йtaient toujours combinйs dans certaines proportions pouvait s’expliquer si l’on regroupait les atomes pour former des unitйs appelйes molйcules. Cependant, le dйbat entre les deux йcoles de pensйe ne fut rйellement clos en faveur des atomistes que dans les premiиres annйes de ce siиcle. L’un des йlйments importants de la preuve physique fut fourni par Einstein. Dans un article йcrit en 1905, quelques semaines avant le cйlиbre article sur la Relativitй Restreinte, Einstein faisait remarquer que ce que l’on appelait le mouvement brownien – le mouvement irrйgulier, au hasard, de petites particules de poussiиre en suspension dans un liquide – pouvait кtre expliquй comme l’effet des atomes du liquide entrant en collision avec les particules de poussiиre.

А ce moment-lа, on soupзonnait dйjа que ces atomes n’йtaient peut-кtre pas insйcables, aprиs tout. Quelques annйes auparavant, un membre du Trinity College а Cambridge, J. J. Thomson, avait dйmontrй l’existence d’une particule de matiиre, appelйe йlectron, qui avait une masse de moins du milliиme de celle de l’atome le plus lйger. Il utilisa un dispositif semblable а un tube йcran moderne de TV: un filament de mйtal chauffй а blanc йmettait des йlectrons, et comme ceux-ci avaient une charge йlectrique nйgative, un champ йlectrique pouvait кtre utilisй pour les accйlйrer vers un йcran enduit d’un produit phosphorescent. Lorsqu’ils heurtaient l’йcran, des flashes de lumiиre se produisaient. On se rendit compte bientфt que ces йlectrons devaient venir de l’intйrieur des atomes eux-mкmes, et en 1911 finalement, le physicien britannique Ernest Rutherford montra que les atomes de matiиre ont bien une structure interne: ils sont faits d’un noyau extrкmement petit, chargй positivement, autour duquel tournent un certain nombre d’йlectrons. Il l’avait dйduit en analysant comment les particules alpha – particules chargйes positivement йmises par des atomes radioactifs – sont dйviйes lorsqu’elles entrent en collision avec des atomes.

D’abord, on estima que le noyau de l’atome йtait fait d’йlectrons et d’un certain nombre variable de particules chargйes positivement appelйes protons, d’aprиs le mot grec signifiant «premier», parce qu’on pensait que c’йtait l’йlйment fondamental constituant la matiиre. Cependant, en 1932, un collиgue de Rutherford а Cambridge, James Chadwick, dйcouvrit que le noyau comprenait une autre particule, appelйe le neutron, qui avait а peu prиs la mкme masse que le proton mais pas de charge йlectrique. Chadwick reзut le prix Nobel pour sa dйcouverte et fut йlu «Master» du Gonville and Caius College, а Cambridge (collиge auquel j’appartiens). Il dйmissionna par la suite а cause de divergences entre lui et les autres membres. Une trиs amиre discussion avait eu lieu lorsqu’un groupe de jeunes, au retour de la guerre, avait votй la mise а l’йcart des cours d’un grand nombre de membres plus вgйs qui avaient longtemps enseignй. C’йtait avant mon йpoque; je suis entrй dans cette institution en 1965, а la fin de ce conflit, lorsque des divergences semblables obligиrent un autre «Master» prix Nobel, Sir Nevil Mott, а dйmissionner йgalement.

Jusqu’а il y a vingt ans environ, on pensait que les protons et les neutrons йtaient des particules «йlйmentaires», mais les expйriences au cours desquelles les protons entraient en collision avec d’autres protons ou des йlectrons а grande vitesse rйvйlиrent qu’ils йtaient eux-mкmes composйs de particules plus petites. Ces particules furent appelйes «quarks» par le physicien Murray Gell-Mann, de Caltech, qui reзut le prix Nobel en 1969. L’origine de ce nom est une mystйrieuse citation de James Joyce: «Trois quarks pour Mфssieur Mark!» Le mot «quark» se prononce comme «quart», mais avec un k а la fin au lieu de t, et il rime d’habitude avec «lark»[1].

Il y a un certain nombre de variйtйs diffйrentes de quarks: ils possиdent au moins six «saveurs[2]» que nous dйnommons up, down, strange, charmed, bot-tom et top. Chaque saveur peut avoir elle-mкme trois «couleurs», rouge, verte et bleue. (Insistons sur le fait que ces termes ne sont que des йtiquettes: les quarks sont beaucoup plus petits que la longueur d’onde de la lumiиre visible et donc ne possиdent aucune couleur au sens habituel du terme. Simplement, les physiciens modernes semblent faire preuve de plus d’imagination pour baptiser les nouvelles particules et les phйnomиnes – ils ne se limitent plus aux йtymologies issues du grec!) Un proton ou un neutron est fait de trois quarks, chacun d’une couleur. Un proton contient deux quarks up et un quark down; un neutron en contient deux down et un up. Nous pouvons crйer des particules faites а partir des autres quarks (strange, charmed, bottom et top), mais elles ont toutes une masse bien plus grande et se dйsintиgrent rapidement en protons et en neutrons.

Nous savons aujourd’hui que ni les atomes ni mкme les protons ou les neutrons ne sont indivisibles. Alors, quelles sont les vйritables particules йlйmentaires, ces briques de construction de base dont tout est fait? Puisque la longueur d’onde de la lumiиre est beaucoup plus grande que la taille d’un atome, nous ne pouvons espйrer «voir» les diffйrentes parties d’un atome au sens premier du terme. Il nous faut avoir recours а quelque chose qui possиde une longueur d’onde beaucoup plus petite. Comme nous l’avons vu au chapitre prйcйdent, la mйcanique quantique nous dit que toutes les particules sont en fait des ondes et que plus grande sera l’йnergie de la particule, plus petite sera sa longueur d’onde correspondante. Aussi la meilleure rйponse que nous puissions fournir а notre question dйpend-elle de la grandeur de l’йnergie de la particule, parce que cela dйterminera la petitesse de l’йchelle de longueur avec laquelle nous pourrions la voir. Ces йnergies de particules sont couramment mesurйes en unitйs appelйes йlectrons-volts. (Dans les expйriences de Thomson sur les йlectrons, nous avons vu qu’il avait utilisй un champ йlectrique pour accйlйrer les йlectrons; l’йnergie qu’un йlectron gagne dans un champ йlectrique d’un volt reprйsente ce que l’on appelle un йlectron-volt.) Au XIXe siиcle, lorsque les seules йnergies de particules que l’on savait utiliser йtaient les йnergies basses de quelques йlectrons-volts engendrйes par des rйactions chimiques comme l’oxydation, on pensait que les atomes йtaient les plus petites unitйs au monde. Dans l’expйrience de Rutherford, les particules alpha ont une йnergie de plusieurs millions d’йlectrons-volts. Plus rйcemment, nous avons appris а utiliser des champs йlectromagnйtiques pour produire des particules йnergйtiques de millions puis de milliards d’йlectrons-volts. Ainsi, nous savons que les particules que nous pensions кtre «йlйmentaires» il y a vingt ans sont, en fait, constituйes de particules plus petites. Vont-elles, alors que nous atteindrons des йnergies plus йlevйes, se rйvйler а leur tour constituйes d’entitйs encore plus petites? C’est certainement possible, mais nous avons quelques bonnes raisons thйoriques de penser que nous possйdons, ou que nous ne sommes pas loin de possйder la connaissance des ultimes briques de construction de la nature.

Par le truchement de la dualitй onde/particule prйsentйe dans le prйcйdent chapitre, tout dans l’univers, y compris la lumiиre et la gravitй, peut кtre dйcrit en termes de particules. Celles-ci possиdent une propriйtй appelйe «spin». Une faзon de se reprйsenter ce spin est d’imaginer les particules comme des petites toupies tournant autour d’un axe. Attention, cela peut кtre trompeur: la mйcanique quantique prйcise que les particules n’ont aucun axe bien dйfini. Ce que le spin d’une particule reprйsente rйellement, c’est son aspect lorsqu’on la regarde depuis des directions diffйrentes. Une particule de spin 0 est comme un point: elle est semblable depuis toutes les directions (fig. 5.1-i). Au contraire, une particule de spin 1 est comme une flиche: elle apparaоt diffйrente selon diffйrentes directions (fig. 5.1-ii). Ce n’est que lorsqu’on lui fait accomplir une rйvolution complиte (360 degrйs) que la particule retrouve le mкme aspect. Une particule de spin 2 est comme une flиche а double tкte (fig. 5.1-iii): elle est identique au bout d’une demi-rйvolution (180 degrйs). De faзon similaire, les particules de spin plus йlevй auront le mкme aspect si on leur fait accomplir de plus petites fractions d’une complиte rйvolution. Tout cela semble bien simple, mais le fait remarquable est qu’il y a des particules qui ne se ressemblent pas si on leur fait accomplir seulement une rйvolution: deux rйvolutions complиtes seront nйcessaires pour qu’elles reprennent leur aspect d’origine! De telles particules ont un spin 1/2.

Figure 5.1

Toutes les particules connues dans l’univers peuvent кtre rйparties en deux groupes: celles de spin demi-entier qui constituent la matiиre de l’univers, et celles de spin 0, 1 et 2, qui, nous le verrons, donnent naissance aux forces agissant entre les particules de matiиre[3]. Les particules de matiиre obйissent au «principe d’exclusion» de Pauli, dйcouvert en 1925 par le physicien autrichien Wolfgang Pauli – ce pour quoi il reзut le prix Nobel en 1945. Cet homme йtait l’archйtype du physicien thйoricien: on disait de lui que sa seule prйsence dans une ville faisait que les expйriences y rataient! Son principe d’exclusion dit que deux particules semblables ne peuvent exister dans le mкme йtat, c’est-а-dire qu’elles ne peuvent occuper ensemble la mкme position ni avoir la mкme vitesse, а l’intйrieur des limites tracйes par le principe d’incertitude. Ce principe est crucial parce qu’il explique pourquoi les particules de matiиre ne s’effondrent pas dans un йtat de densitй trиs haute sous l’influence des forces produites par les particules de spin 0, 1 et 2: si les particules de matiиre ont vraiment des positions trиs proches, elles doivent avoir des vitesses diffйrentes, ce qui signifie qu’elles ne resteront pas dans la mкme position longtemps. Si le monde avait йtй crйй sans le principe d’exclusion, les quarks n’auraient pu former des protons et des neutrons sйparйs et bien dйfinis. Pas plus que ceux-ci n’auraient pu, avec les йlectrons, former des atomes sйparйs et bien dйfinis. Ils se seraient tous effondrйs pour former une «soupe» grossiиrement uniforme et dense.

Une interprйtation recevable de l’йlectron et des autres particules de spin demi-entier vit le jour en 1928, avec une thйorie proposйe par Paul Dirac, qui fut par la suite йlu а la chaire Lucasienne de mathйmatiques de Cambridge (la mкme que celle que Newton occupa en son temps, et que je tiens aujourd’hui). La thйorie de Dirac йtait la premiиre du genre combinant la mйcanique quantique et la Relativitй Restreinte. Elle explique mathйmatiquement pourquoi l’йlectron a un spin demi-entier, c’est-а-dire pourquoi il ne se ressemble pas si vous ne le tournez que d’un tour complet sur lui-mкme, alors qu’il reprend son apparence au bout de deux rйvolutions. Elle prйdisait йgalement que l’йlectron devait avoir un partenaire: l’anti-йlectron ou positron. La dйcouverte du positron en 1932 confirma la thйorie de Dirac et lui valut de recevoir le prix Nobel en 1933. Nous savons aujourd’hui que toute particule a son anti-particule avec laquelle elle peut s’annihiler. (Dans le cas des particules supports-de-force, les antiparticules sont les mкmes que les particules elles-mкmes.) Il pourrait exister des anti-mondes et des anti-gens fait d’anti-particules. Cependant, si vous rencontrez votre anti-vous, ne lui serrez pas la main! Vous disparaоtriez tous deux dans un grand йclair de lumiиre. Pourquoi semble-t-il y avoir beaucoup plus de particules que d’anti-particules autour de nous? C’est une question trиs importante et j’y reviendrai dans la suite de ce chapitre.

En mйcanique quantique, les forces – ou interactions entre particules de matiиre – sont toutes supposйes кtre vйhiculйes par des particules de spin entier, 0, 1 ou 2. Une particule de matiиre, comme un йlectron ou un quark, йmet une particule support-de-force. Le recul dы а cette йmission modifie la vitesse de la particule de matiиre. La particule support-de-force heurte ensuite une autre particule de matiиre et est absorbйe. La collision modifie la vitesse de la seconde particule, exactement comme s’il y avait eu une force entre les deux particules de matiиre.

Le fait qu’elles n’obйissent pas au principe d’exclusion est une importante propriйtй des particules supports-de-force. Cela signifie qu’il n’y a pas de limite au nombre de particules qui peuvent кtre йchangйes, aussi peuvent-elles donner naissance а une force forte. Cependant, si les particules supports-de-force ont une masse йlevйe, il sera difficile de les produire et de les йchanger а grande distance. Aussi, les forces qu’elles supportent n’auront-elles qu’un faible rayon d’action. D’un autre cфtй, si les particules supports-de-force n’ont aucune masse en elles-mкmes, les forces qu’elles gйnиrent pourront avoir un grand rayon d’action. Ces particules supports-de-force йchangйes entre particules de matiиre sont appelйes «virtuelles» parce que, contrairement aux vйritables particules, elles ne peuvent кtre directement mises en йvidence par un dйtecteur de particules. Nous savons qu’elles existent, cependant, parce qu’elles ont un effet mesurable: elles donnent naissance а des interactions entre particules de matiиre. Les particules de spin 0, 1 ou 2 existent aussi dans certaines circonstances en tant que particules rйelles, lorsqu’elles peuvent кtre dйtectйes directement. Elles nous apparaissent alors comme ce qu’un physicien classique appellerait des ondes, telles des ondes de lumiиre ou des ondes gravitationnelles. Elles peuvent quelquefois кtre йmises quand des particules de matiиre interagissent entre elles en en йchangeant. (Par exemple, la force йlectrique rйpulsive entre deux йlectrons est due а l’йchange de photons virtuels, ce que l’on ne peut jamais dйtecter directement; mais si un йlectron en frфle un autre, de vrais photons peuvent кtre йmis que nous dйtectons sous forme d’ondes lumineuses.)

Les particules supports-de-force peuvent кtre regroupйes en quatre catйgories selon l’intensitй de la force qu’elles supportent et les particules avec lesquelles elles interagissent. Soulignons quand mкme que cette division en quatre classes est artificielle; c’est pratique pour l’йtablissement de thйories partielles, mais cela ne correspond а rien de plus profond. En fin de compte, un grand nombre de physiciens espиrent trouver une thйorie unifiйe qui ferait des quatre forces quatre aspects diffйrents d’une force unique. La plupart des physiciens estiment que c’est l’objet principal de la physique d’aujourd’hui. Rйcemment, des tentatives couronnйes de succиs ont unifiй trois de ces quatre catйgories de forces – et je les dйcrirai dans ce chapitre; quant а y joindre la quatriиme – la gravitй –, nous aborderons la question plus tard.

Premiиre catйgorie: la force gravitationnelle. Cette force est universelle, c’est-а-dire que chaque particule ressent la force de la gravitй en fonction de sa masse et de son йnergie. La gravitй est la plus faible des quatre forces а distance; elle est si faible que nous ne l’aurions pas remarquйe sans ses deux propriйtйs spйciales: elle peut agir а trиs grande distance et elle est toujours attractive. Cela veut dire que les forces gravitationnelles trиs faibles entre les particules individuelles de deux gros corps comme la Terre et le Soleil peuvent toutes s’additionner pour produire une force significative. Les trois autres forces ont un plus faible rayon d’action ou bien sont quelquefois attractives et quelquefois rйpulsives, ce qui les conduit а s’annuler. Lorsqu’on envisage le champ gravitationnel en mйcanique quantique, la force entre deux particules de matiиre est dйcrite comme йtant supportйe par une particule de spin 2 appelйe graviton. Celle-ci n’a pas de masse en elle-mкme, aussi la force qu’elle supporte est-elle а long rayon d’action. La force gravitationnelle entre le Soleil et la Terre est attribuйe а l’йchange de gravitons entre les particules qui constituent ces deux corps. Bien que les particules йchangйes soient virtuelles, elles produisent effectivement un effet mesurable: la Terre tourne autour du Soleil! Des gravitons rйels sont а la source de ce que les physiciens classiques appellent des ondes gravitationnelles, qui sont trиs faibles – et si difficiles а dйtecter qu’elles n’ont jamais encore йtй observйes.

La seconde catйgorie est la force йlectromagnйtique qui interagit avec les particules chargйes йlectriquement comme les йlectrons et les quarks, mais pas avec les particules non chargйes comme les gravitons. Elle est plus puissante que la force gravitationnelle. Entre deux йlectrons, la force йlectromagnйtique est quelque un million de milliards de milliards de milliards de milliards de fois (un 1 avec 42 zйros derriиre) plus grande que la force gravitationnelle. Cependant, il y a deux sortes de charges йlectriques, la positive et la nйgative. La force entre deux charges positives sera rйpulsive, comme le sera la force entre deux charges nйgatives, mais entre une charge positive et une charge nйgative, cette force sera attractive. Un grand corps, comme la Terre ou le Soleil, contient а peu prиs un nombre йgal de charges positives et de charges nйgatives. Aussi, les forces attractives et rйpulsives entre particules individuelles s’annulent-elles а peu prиs les unes les autres; on ne constate qu’une trиs faible force йlectromagnйtique rйsiduelle entre eux. Mais а l’йchelle des atomes et des molйcules, les forces йlectromagnйtiques dominent. L’attraction йlectromagnйtique entre des йlectrons chargйs nйgativement et des protons chargйs positivement dans un noyau fait que les йlectrons tournent autour du noyau de l’atome, exactement comme l’attraction gravitationnelle fait que la Terre tourne autour du Soleil. L’attraction йlectromagnйtique est due а l’йchange d’un certain nombre de particules virtuelles sans masse, de spin 1, appelйes photons. Encore une fois, ces photons йchangйs sont des particules virtuelles. Cependant, lorsqu’un йlectron saute d’une orbite autorisйe а une autre plus prиs du noyau, de l’йnergie est libйrйe et un vйritable photon est йmis – ce que l’on peut observer sous forme de lumiиre visible par l’њil si le phйnomиne possиde une longueur d’onde adйquate, sinon grвce а un dйtecteur de photons, un film photographique, par exemple. De mкme, si un photon rйel heurte un atome, il peut faire sauter un йlectron d’une orbite proche du noyau sur une orbite plus йloignйe. Pour cela, l’йnergie du photon sera utilisйe et le photon sera donc absorbй.

La troisiиme catйgorie est celle de l’interaction nuclйaire faible, responsable de la radioactivitй, et qui agit sur toutes les particules de matiиre de spin demi-entier, mais pas sur les particules de spin, 0, 1 ou 2 comme les photons ou les gravitons. L’interaction nuclйaire faible ne fut bien comprise qu’en 1967 quand Abdus Salam, de l’impйrial College а Londres, et Steven Weinberg, de Harvard, proposиrent ensemble les thйories qui unifiиrent son interaction avec la force йlectromagnйtique, de la mкme faзon que Maxwell avait unifiй l’йlectricitй et le magnйtisme environ cent ans plus tфt. Ils ont suggйrй qu’en plus du photon, il existerait trois autres particules de spin 1, connues collectivement sous le nom de bosons vectoriels lourds, mйdiateurs de l’interaction faible. Baptisйs W+ (prononcez: W plus), W- (prononcez: W moins) et Z° (prononcez: Z zйro), chacun aurait une masse d’environ 100 GeV (GeV signifie giga-йlectron-volt ou milliard d’йlectrons-volts). La thйorie de Weinberg-Salam met en йvidence une propriйtй connue sous le nom de «brisure spontanйe de symйtrie». Cela signifie qu’un certain nombre de particules semblent кtre complиtement diffйrentes les unes des autres а basse йnergie mais se rйvиlent en fait кtre des particules du mкme type dans des йtats diffйrents. А de hautes йnergies, toutes ces particules se conduisent de faзon similaire. L’effet est semblable au comportement de la bille au jeu de la roulette. А de hautes йnergies (quand la roue est lancйe fortement), la bille se conduit essentiellement de la mкme faзon: elle accomplit rйvolution sur rйvolution. Mais lorsque la roue ralentit, l’йnergie de la bille dйcroоt et cette derniиre finit par tomber dans l’une des trente-sept cases. En d’autres termes, а basse йnergie, il y a trente-sept йtats diffйrents dans lesquels la bille peut se trouver. Si, pour une raison ou pour une autre, nous ne pouvions observer la bille qu’а basse йnergie, nous pourrions alors penser qu’il y a trente-sept types de billes diffйrents!

Dans la thйorie de Weinberg-Salam, а des йnergies supйrieures а 100 GeV, les trois nouvelles particules et le photon devraient tous se conduire de la mкme maniиre. Mais aux йnergies plus basses des particules que l’on rencontre dans des situations plus normales, cette symйtrie entre particules devrait кtre brisйe. W+, W-et Z° devraient acquйrir de grandes masses, faisant que les forces dont ils seraient les mйdiateurs n’auraient qu’un trиs court rayon d’action. А l’йpoque oщ Salam et Weinberg proposиrent leur thйorie, quelques personnes les crurent mais les accйlйrateurs de particules n’avaient pas assez de puissance pour atteindre les йnergies de l’ordre des 100 GeV requis pour produire de vraies particules W+, W-et Z°. Cependant, dans la dйcennie qui a suivi, les autres prйdictions а basse йnergie de leur thйorie s’accordиrent si bien а l’expйrience qu’en 1979 ils obtinrent le prix Nobel de physique en mкme temps que Sheldon Glashow, de Harvard йgalement, qui avait suggйrй, lui, des thйories unifiйes semblables pour les forces йlectromagnйtiques et les interactions nuclйaires faibles. Le comitй Nobel respira plus librement en 1983 quand furent dйcouverts au CERN (Centre europйen de recherche nuclйaire) les trois partenaires massifs du photon, avec les masses qui avaient йtй correctement prйdites, ainsi que d’autres propriйtйs. Carlo Rubbia, qui dirigeait l’йquipe de quelques centaines de physiciens qui fit cette dйcouverte, reзut le prix Nobel en 1984 en mкme temps que Simon van der Meer, l’ingйnieur du CERN qui dйveloppa le systиme de stockage d’anti-matiиre employй. (Il est trиs difficile de faire quelque chose en physique expйrimentale ces temps-ci si vous n’кtes pas vraiment en haut de la pyramide!)

Quatriиme et derniиre catйgorie: l’interaction nuclйaire forte, qui retient les quarks ensemble dans le proton et le neutron, et protons et neutrons ensemble dans le noyau de l’atome. On pense que cette force est vйhiculйe par une autre particule de spin 1, appelйe gluon, qui interagit seulement avec lui-mкme et avec les quarks. L’interaction nuclйaire forte a une curieuse propriйtй baptisйe «confinement»: elle relie toujours des particules selon des combinaisons qui n’ont pas de couleurs. On ne peut trouver un quark unique qui aurait donc une couleur (rouge, vert ou bleu). Au lieu de cela, un quark rouge doit кtre reliй а un quark vert et а un bleu par un «anneau» de gluons (rouge + vert + bleu = blanc). Un tel triplet constitue un proton ou un neutron. Autre possibilitй: une paire quark/anti-quark (rouge + anti-rouge; vert + anti-vert ou bleu + anti-bleu = blanc). De telles combinaisons reprйsentent des particules connues sous le nom de mйsons, qui sont instables parce que le quark et l’anti-quark peuvent s’annihiler l’un l’autre en produisant des йlectrons et d’autres particules. De faзon similaire, le confinement empкche qu’il existe un gluon solitaire, parce que les gluons ont aussi leur couleur. On doit donc avoir une collection de gluons dont les couleurs s’additionnent pour donner du blanc. Une telle collection forme une particule instable appelйe boule de gluons («glueball»).

Le fait que le confinement nous empкche d’observer un quark ou un gluon isolй pourrait rendre quelque peu mйtaphysique la notion de quark et de gluon en tant que particules. Cependant, il y a une autre propriйtй de l’interaction nuclйaire forte, appelйe «libertй asymptotique», qui fait que les concepts de quarks et de gluons sont bien dйfinis. А une йnergie normale, l’interaction nuclйaire forte est vraiment forte et elle lie solidement les quarks ensemble. Cependant, les expйriences sur de grands accйlйrateurs de particules montrent que, а des hautes йnergies, l’interaction forte devient plus faible et que quarks et gluons se comportent exactement comme des particules libres. La fig. 5.2 montre une photographie de la collision entre un proton de haute йnergie et un anti-proton. Quelques quarks presque libres sont produits et donnent naissance aux «jets» des trajectoires figurant sur cette photographie.

Figure 5.2

Le succиs de l’unification des forces йlectromagnйtique et nuclйaire faible a conduit а un certain nombre de tentatives pour combiner ces deux forces avec l’interaction nuclйaire forte, en ce que l’on a baptisй la «thйorie de la grande unification» (ou GUT)[4]. Ce titre est un rien pompeux: les thйories qui en rйsultent ne sont pas si grandioses, pas plus qu’elles n’unifient, puisqu’elles n’incluent pas la gravitй. Elles ne sont pas non plus de vйritables thйories complиtes puisqu’elles contiennent un certain nombre de paramиtres dont les valeurs ne peuvent кtre prйdites а partir de la thйorie mais doivent кtre choisies pour coller а l’expйrience. Nйanmoins, elles constituent un pas en direction de la thйorie complиte, parfaitement unifiйe. L’idйe de base de la GUT est la suivante: comme nous l’avons dйjа vu, l’interaction nuclйaire forte s’affaiblit а de hautes йnergies et les forces йlectromagnйtiques et faible qui ne sont pas asymptotiquement libres deviennent plus fortes. А une trиs haute йnergie, appelйe йnergie de la grande unification, ces trois forces pourraient toutes avoir la mкme puissance et, ainsi, n’кtre que trois aspects d’une force unique. La GUT prйdit ainsi qu’а cette йnergie-lа, les diffйrentes particules de matiиre de spin demi-entier, comme les quarks et les йlectrons, devraient йgalement кtre essentiellement les mкmes, de maniиre а accomplir ainsi une autre unification.

La valeur de l’йnergie de grande unification n’est pas trиs bien connue mais elle devrait probablement tourner autour du milliard de millions de GeV. L’actuelle gйnйration d’accйlйrateurs de particules peut faire se heurter des particules а des йnergies d’environ une centaine de GeV et de futurs grands instruments devraient permettre d’augmenter cette йnergie а quelques milliers de GeV. Mais un dispositif suffisamment puissant pour accйlйrer des particules а hauteur de l’йnergie de grande unification devrait кtre aussi grand que le Systиme Solaire lui-mкme – et n’aurait que peu de chances d’кtre financй dans le climat d’йconomie actuel. Aussi est-il impossible de tester directement au laboratoire les thйories de grande unification. Cependant, exactement comme dans le cas de la thйorie unifiйe de l’йlectromagnйtisme et de l’interaction faible, certaines consйquences а basse йnergie peuvent кtre vйrifiйes.

La plus intйressante d’entre elles est la prйdiction selon laquelle les protons, qui constituent la majoritй de la masse de la matiиre ordinaire, peuvent spontanйment se dйsintйgrer en particules plus lйgиres comme des anti-йlectrons. La raison pour laquelle ce phйnomиne est possible est qu’au niveau de l’йnergie de grande unification, il n’y a pas de diffйrence essentielle entre un quark et un anti-йlectron. Les trois quarks а l’intйrieur d’un proton n’ont normalement pas assez d’йnergie pour se changer en anti-йlectrons mais, trиs occasionnellement, l’un d’entre eux peut acquйrir suffisamment d’йnergie pour opйrer ce passage – le principe d’incertitude signifie que l’йnergie des quarks а l’intйrieur du proton ne peut кtre fixйe exactement. Le proton devrait alors se dйsintйgrer. La probabilitй pour qu’un quark gagne suffisamment d’йnergie est si faible que l’on devrait attendre pour que cela se produise au moins mille milliards de milliards de milliards d’annйes (un 1 suivi de 30 zйros). C’est bien plus long que le temps йcoulй depuis le Big Bang qui est d’environ dix milliards d’annйes (un 1 suivi de 10 zйros). Aussi pourrait-on penser que la possibilitй de la dйsintйgration spontanйe d’un proton ne pourrait pas кtre vйrifiйe par l’expйrience. Cependant, on peut augmenter la chance de dйtecter une dйsintйgration de ce genre en observant une grande quantitй de matiиre contenant un trиs grand nombre de protons. (Si, par exemple, on observe un nombre de protons йgal а 1 suivi de 32 zйros sur une pйriode d’un an, on devrait s’attendre, selon la GUT la plus simple, а observer plus d’une dйsintйgration.)

Un certain nombre d’expйriences de ce type ont йtй menйes, mais nul n’a encore pu produire la preuve dйfinitive de la dйsintйgration du proton ou du neutron. Une expйrience a utilisй huit mille tonnes d’eau dans la mine de Morton Sait dans l’Ohio (pour йviter que d’autres йvйnements, causйs par des rayons cosmiques, ne puissent кtre confondus avec la dйsintйgration du proton). Puisque rien n’a pu кtre observй lors de cette expйrience, on a pu calculer que la durйe de vie moyenne du proton devait кtre supйrieure а dix mille milliards de milliards de milliards d’annйes (un 1 suivi de 31 zйros). C’est plus long que la durйe de vie prйdite par la thйorie de la grande unification la plus simple, mais des thйories plus йlaborйes prйvoient une durйe de vie encore plus longue. Des expйriences plus sensibles mettant en jeu des quantitйs de matiиre encore plus importantes seront nйcessaires pour les tester.

Mкme s’il est trиs difficile d’observer la dйsintйgration spontanйe du proton, cela peut provenir du fait que notre propre existence est la consйquence du processus inverse, la production de protons, ou plus simplement de quarks, а partir d’une situation initiale dans laquelle il n’y avait pas plus de quarks que d’anti-quarks, ce qui est la faзon la plus naturelle d’imaginer l’univers а ses dйbuts. La matiиre sur terre est faite principalement de protons et de neutrons, qui а leur tour sont faits de quarks. Il n’y a pas d’anti-protons ou d’anti-neutrons fabriquйs а partir d’anti-quarks, en dehors des quelques unitйs que les physiciens ont produites dans les grands accйlйrateurs de particules. Nous avons la preuve, grвce aux rayons cosmiques, qu’il en est de mкme pour toute la matiиre dans notre univers: il n’existe pas d’antiprotons ou d’anti-neutrons, si l’on excepte, en petit nombre, ceux produits comme paire particule/antiparticule dans les collisions а hautes йnergies. S’il y avait de grandes rйgions d’anti-matiиre dans notre Galaxie, nous devrions nous attendre а observer de grandes quantitйs de rayonnement en provenance des limites entre les rйgions de matiиre et d’anti-matiиre, oщ de nombreuses particules devraient se heurter а leurs anti-particules, s’annihilant les unes les autres en donnant naissance а un rayonnement de haute йnergie.

Nous n’avons pas plus de preuves directes en ce qui concerne la matiиre des autres galaxies: protons et neutrons, ou anti-protons et anti-neutrons, cela doit кtre ou l’un ou l’autre; il ne peut y avoir de mйlange au sein d’une mкme galaxie, sinon nous devrions observer le flot de rayonnement des annihilations correspondantes. Nous pensons donc que toutes les galaxies sont composйes de quarks plutфt que d’anti-quarks; il semble peu plausible que quelques galaxies puissent кtre constituйes de matiиre et d’autres d’anti-matiиre.

Pourquoi y aurait-il beaucoup plus de quarks que d’anti-quarks? Pourquoi n’y en a-t-il pas autant? Il est certainement heureux pour nous que ces quantitйs ne soient pas йgales parce que, si elles avaient йtй identiques, tous les quarks et anti-quarks voisins se seraient annihilйs les uns les autres dans l’univers primitif et auraient laissй un univers empli de rayonnement mais sans guиre de matiиre. Il n’y aurait eu alors ni galaxies ni йtoiles ni planиtes sur lesquelles la vie aurait pu se manifester. Heureusement, les thйories de la grande unification peuvent expliquer que l’univers devrait maintenant contenir plus de quarks que d’anti-quarks, mкme s’il a dйbutй avec un nombre йgal de chacun d’eux. Comme nous l’avons vu, la GUT permet aux quarks de se changer en antiйlectrons а hautes йnergies. Elle permet йgalement le processus inverse, anti-quarks devenant йlectrons, et йlectrons et anti-йlectrons devenant anti-quarks et quarks. Il y eut un moment dans l’univers trиs primitif oщ la tempйrature fut si йlevйe que les йnergies des particules auraient pu avoir йtй suffisamment grandes pour permettre ces transformations. Mais pourquoi est-ce que cela a produit plus de quarks que d’anti-quarks? C’est que les lois de la physique ne sont pas tout а fait les mкmes pour les particules et pour les anti-particules.

Avant 1956, on pensait que les lois de la physique obйissaient aux trois symйtries distinctes appelйes C, P et T. En symйtrie C, les lois sont les mкmes pour les particules et les anti-particules. En symйtrie P, les lois sont les mкmes pour toute situation et son image dans un miroir (l’image dans un miroir d’une particule tournant dans le sens des aiguilles d’une montre est celle d’une particule tournant dans le sens inverse). En symйtrie T, si vous inversez la direction du mouvement de toutes les particules et antiparticules, le systиme revient а ce qu’il йtait au tout dйbut; ou, en d’autres termes, les lois sont les mкmes que vous alliez dans le sens du temps ou que vous le remontiez.

En 1956, deux physiciens amйricains, Tsung-Dao Lee et Chen Ning Yang, ont suggйrй que l’interaction faible n’obйirait pas en fait а la symйtrie P et qu’elle laisserait l’univers se dйvelopper d’une faзon diffйrente а partir de la faзon dont l’image miroir de l’univers se dйvelopperait. La mкme annйe, leur collиgue Chien-Shiung Wu prouva que leur prйdiction йtait juste. Elle le fit en alignant des noyaux d’atomes radioactifs dans un champ magnйtique, de faзon а ce qu’ils tournent tous dans le mкme sens, et elle montra que les йlectrons йmis l’йtaient plus souvent dans une direction que dans une autre. L’annйe suivante, Lee et Yang reзurent le prix Nobel pour cette idйe. On avait aussi trouvй que l’interaction faible n’obйissait pas а la symйtrie C. Cela voulait dire qu’un univers composй d’anti-particules se comporterait diffйremment du nфtre. Nйanmoins, il semblait que l’interaction faible obйissait а la symйtrie combinйe CP. C’est-а-dire que l’univers se dйvelopperait de la mкme maniиre que son image dans le miroir si, en plus, chaque particule йtait йchangйe avec son antiparticule! Cependant, en 1964, deux autres Amйricains, J. W. Cronin et Val Fitch, dйcouvrirent que mкme la symйtrie CP n’йtait pas respectйe dans la dйsintйgration de certaines particules appelйes les mйsons K. Cronin et Fitch reзurent le prix Nobel en 1980. (Toute cette sйrie de prix montrait que l’univers n’йtait pas aussi simple qu’on aurait pu le penser!)

Selon un thйorиme mathйmatique, toute thйorie qui obйit а la fois а la Mйcanique Quantique et а la Relativitй doit aussi obйir а la symйtrie combinйe CPT. En d’autres termes, l’univers devrait se conduire de faзon identique si l’on remplaзait les particules par des anti-particules, si l’on prenait son image miroir et si l’on inversait la direction du temps. Mais Cronin et Fitch ont montrй que si l’on remplaзait les particules par des anti-particules et que l’on en prenne l’image miroir sans renverser la direction du temps, l’univers ne se conduirait pas de la mкme faзon. Les lois de la physique changeraient si l’on inversait la direction du temps (elles n’obйissent donc pas а la symйtrie T).

L’univers primitif n’obйit certainement pas а la symйtrie T: comme le temps s’йcoule, l’univers s’йtend – s’il allait dans l’autre sens, l’univers se contracterait. Et puisqu’il y a des forces qui n’obйissent pas а la symйtrie T, cela leur permet, pendant que l’univers s’йtend, de fabriquer plus d’antiйlectrons devenant quarks que d’йlectrons devenant anti-quarks. Puis, au fur et а mesure que l’univers s’йtend et se refroidit, les anti-quarks s’annihilent avec les quarks, mais comme il y a plus de quarks que d’anti-quarks, on pourrait constater un lйger excиs de quarks. Ce sont eux qui forment la matiиre que nous voyons aujourd’hui et dont nous sommes nous-mкmes constituйs. Ainsi, notre propre existence pourrait кtre considйrйe comme une confirmation -purement qualitative – des thйories de la grande unification; les incertitudes sont telles que l’on ne peut prйdire le nombre de quarks qu’aurait laissй subsister l’annihilation, ni mкme si ce sont des quarks ou des anti-quarks qui devraient rester. (En cas d’excиs d’anti-quarks, nous aurions simplement dйnommй anti-quarks les quarks et quarks les anti-quarks.)

Les thйories de la grande unification n’incluent pas la force de gravitй. Cela n’a pas beaucoup d’importance parce que la gravitй est une force si faible que ses effets peuvent кtre habituellement nйgligйs lorsque nous travaillons sur des particules йlйmentaires ou des atomes. Cependant, le fait qu’elle soit а la fois а grand rayon d’action et toujours attractive signifie que ses effets s’additionnent toujours. Aussi, pour un nombre suffisamment grand de particules de matiиre, les forces gravitationnelles finissent par dominer. C’est pourquoi la gravitй dйtermine l’йvolution de l’univers. Mкme pour des objets de la taille des йtoiles, la force attractive de la gravitation peut l’emporter sur toutes les autres forces et causer l’effondrement stellaire. Mon travail dans les annйes soixante-dix fut centrй sur les trous noirs qui peuvent rйsulter de tels effondrements stellaires et des champs gravitationnels intenses qui les entourent. D’oщ les premiers soupзons relatifs а la faзon dont les thйories de la Mйcanique Quantique et de la Relativitй Gйnйrale pourraient chacune affecter l’autre – bref aspect de la forme d’une thйorie quantique de la gravitation encore а venir.


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LE PRINCIPE D’INCERTITUDE| LES TROUS NOIRS

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