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Notre vision de l’univers

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Remerciements

J’ai dйcidй d’йcrire un livre sur l’Espace et le Temps а l’intention du grand public aprиs les confйrences Lњb que j’ai donnйes а Harvard en 1982. Il existait dйjа un nombre considйrable de livres sur les dйbuts de l’Univers et les trous noirs, d’excellents, comme Les Trois Premiиres Minutes de l’Univers, de Steven Weinberg, et de trиs mauvais, que je ne citerai pas. Je trouvais cependant qu’aucun d’entre eux ne rйpondait vraiment aux questions qui m’avaient conduit а faire de la recherche en cosmologie et en thйorie des quanta: d’oщ vient l’Univers? Comment et pourquoi a-t-il commencй? Connaоtra-t-il une fin, et si oui, comment? Questions qui intйressent tout le monde. Mais la science moderne est devenue si technique que seul un tout petit nombre de spйcialistes peut maоtriser les mathйmatiques qui sont au cњur tic la description. Et pourtant, les idйes fondamentales sur l’origine et le destin de l’Univers peuvent prendre une forme non mathйmatique, accessible а une personne dйpourvue de formation scientifique. C’est ce que j’ai essayй de faire ici et le lecteur jugera si j’ai rйussi.

On m’a dit que chaque йquation incluse dans le livre en diminuerait les ventes de moitiй. J’ai donc dйcidй qu’il n’y en aurait aucune. А la fin, toutefois, j’en ai mis une, la fameuse йquation d’Einstein: E = mcІ. J’espиre que cela n’effrayera pas la moitiй de mes lecteurs potentiels.

J’ai eu la malchance d’кtre atteint d’une maladie neuro-motrice (maladie de Lou Gehrig), mais presque partout ailleurs, la chance m’a souri. L’aide et le rйconfort que j’ai reзus de ma femme Jane et de mes enfants Robert, Lucy et Timmy m’ont permis de mener une vie а peu prиs normale et d’avoir une carriиre remplie de succиs. Autre chance, mon choix en faveur de la physique thйorique, parce que tout est dans la tкte. Ainsi, mon incapacitй n’aura-t-elle pas йtй un handicap sйrieux. Mes collиgues scientifiques m’ont tous beaucoup aidй.

Dans la premiиre phase «classique» de ma carriиre, mes principaux associйs et collaborateurs furent Roger Penrose, Robert Geroch, Brandon Carter, et George Ellis. Je leur suis reconnaissant de leur aide et du travail que nous avons fait ensemble. Cette йpoque trouva son couronnement dans le livre The Large Scale Structure of Space-time (La Structure а grande йchelle de l’espace-temps) que Ellis et moi avons йcrit en 1973. Je ne suggйrerai pas aux lecteurs du prйsent livre de consulter ce travail pour plus ample information: il est hautement technique et tout а fait illisible. J’espиre que j’ai appris depuis lors а йcrire d’une maniиre plus facile а comprendre.

Dans la deuxiиme phase «quantique» de mon travail, а partir de 1974, mes principaux collaborateurs ont йtй Gary Gibbons, Don Page, et Jim Hartle. Je leur dois beaucoup, ainsi qu’а mes йtudiants en recherche, qui m’ont beaucoup aidй, а la fois aux sens physique et thйorique du mot. Demeurer au niveau de mes йtudiants m’a grandement stimulй et m’a, j’espиre, empкchй de m’enfoncer dans l’orniиre.

J’ai йtй grandement aidй pour ce livre par Brian Whilt, l’un de mes йtudiants. J’ai attrapй une pneumonie en 1985, aprиs en avoir йcrit une premiиre version. J’ai dы subir une trachйotomie qui m’a enlevй la capacitй locutoire et m’a rendu presque impropre а communiquer. Je pensais que je serais incapable de le finir. Non seulement Brian m’a aidй а le rйviser, mais il m’a aussi fait utiliser un programme de communication nommй Living Center que m’a offert Walt Woltosz, de Words Plus Inc. de Sunnyvale, Californie. Grвce а cet appareil, je peux а la fois йcrire des livres et des articles, et parler aux gens avec un synthйtiseur offert par Speach Plus, йgalement de Sunnyvale, Californie. Le synthйtiseur et un petit ordinateur individuel ont йtй montйs sur ma chaise roulante par David Mason. Ce systиme a fait toute la diffйrence: en fait, je peux communiquer maintenant beaucoup mieux qu’avant la perte de ma voix.

Un grand nombre de gens, qui ont eu connaissance des versions prйliminaires, m’ont fait des suggestions pour amйliorer ce livre. En particulier, Peter Guzzardi, mon йditeur de Bantam Books, m’a envoyй des pages et des pages de commentaires et de questions concernant tout ce qu’il croyait que je n’avais pas expliquй proprement. J’йtais plutфt irritй, je dois l’admettre, quand j’ai reзu la grande liste de changements qu’il proposait, mais il avait tout а fait raison. Je suis persuadй que le livre a bйnйficiй de son insistance а ce que je revois les choses de plus prиs.

Je suis trиs reconnaissant а mes assistants, Colin Williams, David Thomas and Raymond Laflamme; mes secrйtaires, Judy Fella, Ann Ralph, Cheryl Billington, et Sue Masey; et а mon йquipe d’infirmiиres. Rien de tout cela n’aurait йtй possible sans l’aide apportйe а ma recherche et а mes dйpenses mйdicales fournie par le Gonville et Caius College, Science and Engineering Research Council, et par les Fondations Leverhulme, McArthur, Nuffield et Ralph Smith. Je leur exprime toute ma reconnaissance.

Stephen Hawking
20 octobre 1987

Introduction

Nous menons notre vie quotidienne sans presque rien comprendre au monde qui est le nфtre. Nous accordons peu de pensйes а la machinerie qui engendre la lumiиre du Soleil, rendant ainsi la vie possible, а la gravitй qui nous colle а une Terre qui, autrement, nous enverrait tournoyer dans l’espace, ou aux atomes dont nous sommes faits et dont la stabilitй assure notre existence. А l’exception des enfants (qui n’en savent pas assez long pour poser les questions importantes), peu d’entre nous passent beaucoup de temps а se demander pourquoi la nature est telle qu’elle est; d’oщ vient le cosmos ou s’il a toujours йtй lа; si le temps fera un jour machine arriиre et si les effets prйcйderont les causes ou s’il y a des limites extrкmes а la connaissance humaine. Il y a mкme des enfants, et j’en ai rencontrйs, qui veulent savoir а quoi ressemble un trou noir, quelle est la plus petite parcelle de matiиre; pourquoi nous nous souvenons du passй et non du futur; comment il se fait, s’il y avait un chaos au dйbut, qu’il y ait apparemment de l’ordre aujourd’hui; et pourquoi il y a un Univers.

Dans notre sociйtй, parents et professeurs rйpondent couramment а de telles questions en haussant les йpaules ou en faisant rйfйrence а quelque prйcepte religieux vaguement rapportй. Ils se sentent mal а l’aise sur de tels sujets, parce qu’ils soulignent clairement les limites de la connaissance humaine.

Mais bien de la philosophie et bien de la science sont issues de telles questions. Un nombre croissant d’adultes les posent de plus en plus volontiers et recueillent а l’occasion quelques rйponses ahurissantes. А mi-chemin des atomes et des йtoiles, nous йtendons l’horizon de nos explorations pour embrasser а la fois l’infiniment petit et l’infiniment grand.

Au printemps 1974, environ deux ans avant que la sonde spatiale Viking ne se pose sur Mars, j’assistai а un meeting en Angleterre, organisй par la Royal Society de Londres, consacrй а la question de la vie extra-terrestre. Pendant la pause-cafй, je remarquai qu’une rйunion beaucoup plus nombreuse se tenait dans une salle voisine, oщ ma curiositй me fit entrer. Je compris bientфt que j’йtais tйmoin d’un rite ancien, l’investiture de nouveaux membres de la Royal Society, l’une des plus anciennes organisations savantes de la planиte. Au premier rang, un jeune homme sur une chaise roulante йtait en train, avec lenteur, d’inscrire son nom sur un livre qui portait sur ses premiиres pages la signature d’Isaac Newton. Quand enfin il eut terminй, il y eut une ovation йmouvante. Stephen Hawking йtait une lйgende dйjа.

Hawking est maintenant «Lucasian Professor of Mathematics» а l’Universitй de Cambridge, poste jadis occupй par Newton et, plus tard, par P. A. M. Dirac, deux cйlиbres explorateurs de l’infiniment grand et de l’infiniment petit. Il est leur digne successeur. Ainsi, le premier ouvrage de Hawking pour le non-spйcialiste est plein de rйcompenses de toutes sortes pour le simple public. Il fournit des lueurs sur le travail intellectuel de son auteur, aussi passionnantes que son multiple contenu. Il fourmille de rйvйlations brillantes sur les limites de la physique, de l’astronomie, de la cosmologie, et du courage.

C’est aussi un livre sur Dieu… ou peut-кtre sur l’absence de Dieu. Le mot Dieu emplit ces pages. Hawking s’embarque dans une recherche pour rйpondre а la fameuse question d’Einstein se demandant si Dieu avait le choix en crйant l’univers. Hawking essaie, et il le dit explicitement, de comprendre la pensйe de Dieu. Et cela rend encore plus inattendue la conclusion de cet effort, au moins jusqu’а prйsent: un univers sans limites dans l’espace, sans commencement ou fin dans le temps, et rien а faire pour le Crйateur.

Carl Sagan
Cornell University
Ithaca, New York

NOTRE VISION DE L’UNIVERS

Un savant cйlиbre (certains avancent le nom de Bertrand Russell) donna un jour une confйrence sur l’astronomie. Il dйcrivit comment la Terre tournait autour du Soleil et de quelle maniиre le Soleil, dans sa course, tournait autour du centre d’un immense rassemblement d’йtoiles que l’on appelle notre Galaxie. А la fin, une vieille dame au fond de la salle se leva et dit: «Tout ce que vous venez de raconter, ce sont des histoires. En rйalitй, le monde est plat et posй sur le dos d’une tortue gйante.» Le scientifique eut un sourire hautain avant de rйtorquer: «Et sur quoi se tient la tortue? – Vous кtes trиs perspicace, jeune homme, vraiment trиs perspicace, rйpondit la vieille dame. Mais sur une autre tortue, jusqu’en bas!»

La plupart d’entre nous pourraient trouver plutфt ridicule de considйrer que notre univers est comme une tour sans fin, faite de tortues empilйes les unes sur les autres, mais pourquoi ce que nous savons vaudrait-il mieux que cela? D’oщ vient l’univers et oщ va-i-il? A-t-il eu un commencement, et si oui, qu’y avait-il avant? Quelle est la nature du temps? Aura-t-il une fin? Tout rйcemment, d’importantes dйcouvertes en physique, dues en partie aux nouvelles technologies et а leurs possibilitйs fantastiques, suggиrent des rйponses а quelques-unes de ces questions de fond. Un jour viendra oщ ces rйponses а leur tour nous sembleront aussi йvidentes que le fait que la Terre tourne autour du Soleil, ou peut-кtre aussi ridicules que la tour de tortues. Seul le temps (quoi qu’il puisse кtre) nous le dira.

Dиs 340 avant Jйsus-Christ, le philosophe grec Aristote avanзa – dans son ouvrage Du ciel – deux solides arguments en faveur d’une Terre sphйrique plutфt que plate. Tout d’abord, il avait compris que les йclipses de Lune йtaient dues au fait que la Terre passait entre le Soleil et la Lune. L’ombre projetйe sur la Lune йtait toujours ronde, ce qui ne pouvait кtre le cas que si notre planиte йtait sphйrique. Si elle avait eu la forme d’un disque plat, son ombre aurait йtй allongйe et elliptique, а moins que le phйnomиne d’йclipse n’intervienne jamais qu’au moment oщ le Soleil se trouve exactement derriиre le centre du disque. De plus, les pйrйgrinations des Grecs leur avaient appris que l’Йtoile Polaire apparaissait plus bas sur l’horizon dans les rйgions du sud que dans le Nord. (Йtant donnй que l’Йtoile Polaire est а l’aplomb du pфle Nord, un observateur au Pфle la verra juste au-dessus de sa tкte, alors qu’а l’йquateur, il la verra briller juste au-dessus de l’horizon.) D’aprиs la diffйrence des positions apparentes qu’occupait l’Йtoile Polaire en Йgypte et en Grиce, Aristote avait dйjа calculй approximativement que la circonfйrence de la Terre devait кtre de quatre cent mille stades. On ne sait pas exactement quelle йtait la longueur d’un de ces stades, mais il est probable que cela devait йquivaloir environ а deux cents mиtres, ce qui donne pour l’estimation aristotйlicienne une valeur deux fois plus grande que celle que nous admettons couramment. Les Grecs disposaient mкme d’un troisiиme argument en faveur de la rotonditй de la Terre: comment expliquer autrement le fait qu’а l’horizon ce soient d’abord les voiles d’un navire qui apparaissent, avant sa coque?

Aristote pensait que la Terre йtait immobile et que le Soleil, la Lune, les planиtes et les йtoiles tournaient selon un mouvement circulaire autour d’elle. Il pensait cela parce qu’il estimait, pour des raisons mystiques, que la Terre йtait le centre de l’univers et que le mouvement circulaire reprйsentait la perfection. Dйveloppant cette idйe au IIe siиcle avant Jйsus-Christ, Ptolйmйe aboutit а un systиme cosmologique achevй. La Terre occupait la position centrale, entourйe de huit sphиres qui portaient respectivement la lune, le Soleil, les йtoiles et les cinq planиtes connues А l’йpoque, Mercure, Vйnus, Mars, Jupiter et Saturne. Les planиtes elles-mкmes dйcrivaient de petits cercles sur leurs sphиres respectives, cela pour tondre compte des trajectoires planйtaires assez complexes que l’on observait dans le ciel. La sphиre la plus extйrieure portait les йtoiles fixes, qui conservaient la mкme position les unes par rapport aux autres, mais qui tournaient en bloc. Ce qu’il y avait au-delа de cette derniиre sphиre, on ne le savait pas trиs bien mais en tout cas, ce n’йtait certainement pas а la portйe de l’humanitй.

Le modиle de Ptolйmйe fournissait un systиme relativement sыr pour prйdire la position des corps cйlestes dans le ciel. Mais pour que ses prйdictions collent aux observations, Ptolйmйe avait dы avancer l’hypothиse que la Lune suivait une trajectoire qui l’amenait parfois deux fois plus prиs de la Terre qu’а d’autres moments. Cela impliquait qu’elle aurait dы alors nous apparaоtre deux fois plus grosse que d’habitude! Ptolйmйe йtait conscient de ce dйfaut mais son systиme n’en fut pas moins gйnйralement, si ce n’est universellement, adoptй. L’Йglise chrйtienne y trouva une vision de l’univers en accord avec les Saintes Йcritures, et qui avait le gros avantage de laisser de la place au-delа de la sphиre des fixes pour le Paradis et l’Enfer.

Cependant, un systиme plus simple fut proposй en 1514 par un prкtre polonais, Nicolas Copernic. (Tout d’abord, par peur d’кtre accusй d’hйrйsie et brыlй par son Йglise, celui-ci publia sa conception sous le couvert de l’anonymat.) D’aprиs lui, le Soleil йtait immobile au centre de l’Univers et les planиtes dйcrivaient des orbites circulaires autour de notre йtoile. Presque un siиcle s’йcoula avant que cette hypothиse ne soit prise au sйrieux. Puis, deux astronomes – l’un allemand, Johannes Kepler, et l’autre italien, Galilйe – commencиrent а dйfendre publiquement la thйorie de Copernic, en dйpit du fait que les orbites qu’elle prйdisait ne coпncidaient pas exactement avec les observations. Le coup fatal а la thйorie d’Aristote/Ptolйmйe survint en 1609. Cette annйe-lа, Galilйe se mit а observer le ciel nocturne avec la lunette, qui venait tout juste d’кtre inventйe. En regardant ainsi Jupiter, il dйcouvrit que cette planиte йtait accompagnйe de plusieurs petits satellites (ou lunes) qui tournaient autour d’elle. Cela laissait supposer que tout ne devait pas tourner obligatoirement autour de la Terre elle-mкme, comme Aristote et Ptolйmйe l’entendaient. (Bien sыr, il йtait encore possible de croire que la Terre йtait immobile au centre de l’Univers et que les lunes de Jupiter dйcrivaient des trajectoires extrкmement compliquйes autour de la Terre, donnant l’illusion de tourner autour de Jupiter. Cependant, la conception de Copernic йtait bien plus simple). А cette mкme йpoque, Johannes Kepler modifia la thйorie du prкtre polonais, en suggйrant que les planиtes dйcrivent non plus des cercles mais des ellipses (une ellipse est un cercle allongй). Les prйdictions correspondirent enfin aux observations.

Pour Kepler, les orbites elliptiques n’йtaient qu’une hypothиse ad hoc, et mкme plutфt dйsagrйable, car ces figures йtaient manifestement moins parfaites que des cercles. Ayant dйcouvert presque accidentellement que les orbites elliptiques rendaient bien compte des observations, Kepler ne pouvait les accorder avec son idйe selon laquelle les planиtes tournaient autour du Soleil en raison des forces magnйtiques. L’explication fut fournie seulement beaucoup plus tard, en 1687, lorsque Newton publia ses Philoosophiae Naturalis Principia Mathematica, probablement le travail le plus important jamais effectuй en physique par un homme seul. Dans cet ouvrage, Newton йchafaudait non seulement la thйorie expliquant comment les corps se mouvaient dans l’espace et dans le temps, mais il y dйveloppait aussi les mathйmatiques complexes nйcessaires а l’analyse de ces mouvements. De plus, le savant anglais proposait la loi de la gravitation universelle selon laquelle tout corps dans l’univers est attirй par tout autre corps selon une force d’autant plus grande que les corps sont plus massifs et plus proches; force qui fait que les objets tombent sur le sol. (L’histoire selon laquelle Newton fut mis sur la voie de cette dйcouverte par une pomme qui lui serait tombйe sur la tкte est trиs certainement apocryphe. Tout ce que Newton a jamais dit а ce sujet est qu’il eut l’idйe de la gravitation alors qu’il йtait assis «dans une attitude contemplative» et «qu’elle avait йtй occasionnйe par la chute d’une pomme.») Newton continuait en montrant que c’йtait bien la gravitation qui йtait responsable dы mouvement elliptique de la Lune autour de la Terre, tout comme elle йtait йgalement responsable des trajectoires elliptiques de la Terre et des planиtes autour du Soleil.

Le modиle copernicien se dйbarrassait donc des sphиres cйlestes de Ptolйmйe, et avec elles, de l’idйe que l’Univers avait une frontiиre naturelle. Йtant donnй que les «йtoiles fixes» ne semblaient pas changer de position – exceptй leur mouvement d’ensemble dans le ciel dы а la rotation de la Terre autour de son axe –, il devenait tout naturel de supposer qu’elles йtaient des objets semblables а notre Soleil, mais beaucoup plus йloignйs.

Newton avait compris que, selon sa thйorie de la gravitation, les йtoiles devaient s’attirer entre elles, et que, apparemment, elles ne pouvaient fondamentalement pas rester au repos. Ne tomberaient-elles pas toutes en un point? Dans une lettre de 1691 adressйe а Richard Bentley, autre penseur de premier plan de cette йpoque, Newton affirma que ce serait certainement le cas si les йtoiles en nombre fini йtaient distribuйes dans une rйgion finie de l’univers. Mais il avait calculй que si, au contraire, elles йtaient en nombre infini, distribuйes plus ou moins uniformйment dans un espace infini, cela n’arriverait pas, car il n’existerait aucun point central vers lequel elles pourraient alors tomber.

Cela est un exemple des piиges que l’on rencontre а propos de l’infini. Dans un univers infini, chaque point peut кtre considйrй comme un centre parce que chacun compte un nombre infini d’йtoiles autour de lui. L’approche correcte – qui ne fut effectuйe que beaucoup plus tard – consiste а prendre en compte la situation finie, dans laquelle les йtoiles tombent toutes les unes sur les autres, et а se demander comment les choses йvolueraient si l’on en prenait d’autres en compte, distribuйes а peu prиs uniformйment en dehors de cette rйgion. D’aprиs la loi de Newton, les йtoiles supplйmentaires ne devraient pas causer la moindre diffйrence en moyenne, et toutes devraient tomber tout aussi vite. Ajoutons autant d’йtoiles que nous voulons, elles s’effondreront toujours sur elles-mкmes. Nous savons aujourd’hui qu’il est impossible d’avoir un modиle statique d’univers infini dans lequel la gravitation soit toujours attractive.

Il eut intйressant de remarquer que, dans le climat gйnйral de pensйe prйcйdant le XXe siиcle, personne n’a suggйrй que l’Univers pourrait se dilater ou se contracter. Il йtait gйnйralement admis ou bien que l’univers existait depuis toujours dans un йtat inchangй, ou bien qu’il avait йtй crйй а un instant prйdit du passй, plus ou moins semblable а ce qu’on observait aujourd’hui. Cela pouvait кtre dы en partie а la tendance humaine а croire en des vйritйs йternelles, aussi bien qu’au rйconfort que l’homme trouvait а penser que, malgrй le fait que les annйes s’envolaient et qu’il mourrait, l’Univers, lui, restait йternel et identique а lui-mкme.

Mкme ceux qui avaient compris que la thйorie newtonienne de la gravitation dйmontrait que l’Univers ne pouvait pas кtre statique ne pensиrent pas а suggйrer une expansion. А la place, ils entreprirent de modifier la thйorie en rendant rйpulsive а grande distance la force gravitationnelle. Cela ne modifiait pas de faзon significative leurs prйdictions des mouvements des planиtes, mais autorisait une distribution infinie d’йtoiles а rester en йquilibre stable – les forces attractives s’exerзant entre йtoiles proches йtant contrebalancйes par les forces rйpulsives dues aux йtoiles plus lointaines. Cependant, on sait aujourd’hui qu’un tel йquilibre serait instable: si les йtoiles d’une rйgion quelconque venaient а se rapprocher un tant soit peu les unes des autres, les forces qui les attirent croоtraient jusqu’а prendre le pas sur les forces rйpulsives, de telle sorte que les йtoiles continueraient а tomber les unes sur les autres. D’un autre cфtй, si les йtoiles venaient а s’йloigner lйgиrement les unes des autres, les forces rйpulsives se mettraient а dominer et les йcarteraient encore plus.

Gйnйralement, on attribue au philosophe allemand Henrich Olbers – qui traita de cette thйorie en 1823 une autre objection а un univers infini statique. En fait, plusieurs contemporains de Newton avaient dйjа soulevй le problиme et l’article d’Olbers ne fut pas le premier а prйsenter des arguments plausibles а son encontre. Toutefois, il fut le premier а кtre largement remarquй. La difficultй venait du fait que dans un univers statique infini, pratiquement toutes les lignes de visйe devraient aboutir а la surface d’une йtoile. Aussi devrait-on s’attendre а ce que tout le ciel soit aussi brillant que le Soleil, mкme la nuit. Le contre-argument d’Olbers йtait que la lumiиre des йtoiles lointaines devait кtre affaiblie par de la matiиre interposйe qui l’aurait absorbйe. Cependant, si c’йtait le cas, cette matiиre aurait dы se rйchauffer а la longue, jusqu’а rayonner aussi brillamment que les йtoiles. La seule faзon d’йviter la conclusion que l’ensemble du ciel nocturne devrait кtre aussi brillant que la surface du Soleil йtait alors d’admettre que les йtoiles ne brillaient pas depuis toujours mais qu’elles s’йtaient bel et bien allumйes а un moment donnй dans le passй. Alors, la matiиre interposйe aurait pu ne pas avoir йtй suffisamment chauffйe, ou la lumiиre des йtoiles lointaines n’avoir pas encore eu le temps de nous atteindre. Et cela nous amиne а la question de savoir ce qui aurait provoquй l’allumage initial des йtoiles.

La naissance de l’Univers avait, bien sыr, dйjа fait l’objet de discussions antйrieures. Pour nombre de cosmologies anciennes et selon la tradition juive, chrйtienne et musulmane, l’Univers est nй а un instant donnй, dans un passй pas trиs йloignй. En faveur d’une telle naissance, il y a le sentiment qu’il est nйcessaire d’avoir une «Cause Premiиre» pour expliquer son existence. (А l’intйrieur de l’Univers, vous pouvez toujours expliquer un йvйnement en tant que consйquence d’un йvйnement antйrieur, mais l’existence de l’Univers lui-mкme ne peut s’expliquer de cette faзon que s’il a un commencement.) Un autre argument, avancй par saint Augustin dans son ouvrage La Citй de Dieu, fait remarquer que la civilisation avance et que nous nous souvenons de celui qui accomplit tel haut fait ou dйveloppe telle technique. Ainsi l’homme, et de la mкme maniиre peut-кtre aussi l’Univers, n’auraient-ils pu exister depuis beaucoup plus longtemps. Saint Augustin admet la date d’environ 5000 ans avant Jйsus-Christ pour la crйation de l’Univers, date donnйe par la Genиse. (Il est intйressant de noter que cela n’est pas si loin de la derniиre glaciation qui se termina vers -10 000 avant Jйsus-Christ, date que les archйologues avancent comme vйritable point de dйpart de notre civilisation.)

Aristote, comme la plupart des philosophes grecs, n’aimait pas l’idйe de crйation car elle prйsentait un arriиre-goыt d’intervention divine. Il croyait par consйquent que la race humaine et le monde qui l’entoure existaient et existeraient а jamais. Les Anciens reconnaissaient dйjа la valeur de l’argument du progrиs mentionnй plus haut et ils y rйpondaient en professant que dйluges et autres catastrophes ramenaient pйriodiquement а chaque fois la race humaine sur la ligne de dйpart.

Les questions relatives а la naissance de l’Univers dans le temps et а sa limite dans l’espace furent par la suite largement йtudiйes par le philosophe Emmanuel Kant dans son monumental (et trиs obscur) ouvrage, Critique de la raison pure, publiй en 1781. Kant baptisa ces questions «antinomies» (c’est-а-dire: contradictions) de la raison pure parce qu’il estimait qu’il existait autant d’arguments – irrйfutables en faveur de la thиse d’un Univers ayant commencй un jour que de son antithиse, un Univers ayant existй depuis toujours. Son argument en faveur de la thиse йtait que si l’Univers n’avait pas eu de commencement, il aurait dы y avoir une pйriode infinie de temps avant tout йvйnement, ce qu’il considйrait comme absurde; en faveur de l’antithиse, il pensait que si l’Univers avait eu un commencement, il y aurait eu une pйriode infinie de temps avant ce dйbut, alors pourquoi serait-il nй а tel instant donnй? En fait, thиse et antithиse sont exactement la mкme chose. Elles sont toutes deux fondйes sur l’hypothиse kantienne non formulйe d’un temps qui remonte indйfiniment dans le passй, que l’Univers ait existй depuis toujours ou non. Comme nous le verrons, le concept de temps n’a aucun sens avant la naissance de l’Univers. Cela fut pour la premiиre fois remarquй par saint Augustin. А la question: «Que fit Dieu avant de crйer l’Univers?» il ne rйpondait pas: «Il prйparait l’Enfer pour ceux qui posent de telles questions.» Il prйfйrait dire que le temps йtait une propriйtй de L’Univers que Dieu avait crйй, et que le temps n’existait pas avant.

Lorsque les gens croyaient en un Univers fondamentalement statique et sans changement, la question de savoir s’il йtait nй ou non n’intйressait que les mйtaphysiciens ou les thйologiens. On pouvait rendre compte des observations aussi bien en penchant pour un univers ayant toujours existй qu’en soutenant la thйorie d’un univers mis en mouvement а un instant donnй et de telle sorte qu’il paraisse avoir toujours existй. Mais en 1929, Edwin Hubble fit une observation cruciale: oщ que nous regardions, les galaxies lointaines s’йloignent de nous а toute vitesse. Cela signifie qu’en des temps plus anciens, les objets avaient йtй plus proches les uns des autres. En fait, il semble qu’il y ait eu un moment, il y a dix ou vingt milliards d’annйes, oщ tous ces objets йtaient exactement а la mкme place et oщ, par consйquent, la densitй de L’Univers йtait infinie. Cette dйcouverte amenait enfin la question de la naissance de L’Univers devant la Science.

Les observations de Hubble sous-entendaient qu’il y avait eu un moment, baptisй le «Big Bang», oщ l’univers avait йtй infiniment petit et infiniment dense. Dans de telles conditions, toutes les lois de la physique, et par consйquent leur capacitй а prйvoir le futur, s’effondraient. Si des йvйnements antйrieurs а ce moment n’avaient jamais existй, ils ne pourraient affecter ce qui arrive dans notre temps. Leur existence peut donc кtre ignorйe parce qu’ils n’auront aucune consйquence observationnelle. On peut dire que le temps a commencй au Big Bang, au sens oщ des temps antйrieurs ne seront tout simplement pas dйfinis. Insistons sur le fait que ce commencement dans le temps est trиs diffйrent de ceux qui ont йtй examinйs auparavant. Dans un Univers sans changement, le commencement dans le temps est quelque chose qui doit кtre imposй par un кtre situй hors de l’Univers; il n’y a aucune nйcessitй physique pour un tel dйbut. On peut imaginer que Dieu a crйй l’Univers littйralement а n’importe quel instant dans le passй. D’un autre cфtй, si l’Univers est en expansion, il peut y avoir des raisons physiques а sa naissance. On peut encore imaginer que Dieu a crйй l’Univers а l’instant du Big Bang, ou mкme aprиs, de faзon qu’il ressemble а ce qu’il aurait dы кtre s’il y en avait eu un; mais ce serait un non-sens de supposer qu’il l’ait crйй avant. Un Univers en expansion n’exclut pas la possibilitй d’un crйateur mais il dйfinit l’instant oщ ce dernier aurait pu accomplir son њuvre!

Pour discuter de la nature de l’Univers et examiner des questions telles que son commencement ou sa fin, il nous faut bien comprendre ce qu’est une thйorie scientifique. Considйrons l’opinion naпve selon laquelle une thйorie est un modиle d’Univers (ou d’une partie limitйe de l’Univers) et un ensemble de rиgles mettant en relation des quantitйs issues du modиle et des observations. Elle n’existe que dans notre esprit et ne peut avoir d’autre rйalitй (quelle qu’en soit la signification). Une thйorie sera valable si elle satisfait aux deux conditions suivantes: dйcrire avec exactitude une vaste catйgorie d’observations sur la base d’un modиle qui ne contient que quelques йlйments arbitraires, et faire des prйdictions prйcises concernant les rйsultats d’observations futures. Exemple, la thйorie d’Aristote selon laquelle tout йtait fait de quatre йlйments, la terre, l’air, le feu et l’eau, йtait suffisamment simple pour effectuer des descriptions, mais elle ne permettait pas de prйdiction prйcise. La thйorie de la gravitation de Newton йtait fondйe, elle, sur un modиle encore plus simple, dans lequel les corps s’attiraient l’un l’autre selon une force proportionnelle а une quantitй appelйe leur masse et inversement proportionnelle au carrй de la distance qui les sйparait. Cependant, elle prйdisait les mouvements du Soleil, de la Lune et des planиtes avec un haut degrй d’exactitude.

Toute thйorie physique est toujours provisoire en ce sens qu’elle n’est qu’une hypothиse: vous ne pourrez jamais la prouver. Peu importe le nombre de fois oщ les rйsultats d’une expйrience s’accorderont avec une thйorie donnйe; vous ne pourrez jamais кtre sыr que, la fois suivante, ce rйsultat ne la contredira pas. Vous pouvez йgalement rйfuter une thйorie en trouvant une observation unique qui ne cadre pas avec ses prйdictions. Comme le philosophe des sciences Karl Popper l’a soulignй, une bonne thйorie se caractйrise par le fait qu’elle fait un certain nombre de prйdictions qui pourraient en principe кtre rйfutйes ou rendues fausses par l’observation. Chaque fois que de nouvelles expйriences viendront corroborer les prйdictions, la thйorie sera confortйe, et notre confiance en elle s’accroоtra; mais si jamais une nouvelle observation ne s’inscrit pas dans son cadre, il nous faudra l’abandonner ou la modifier. Du moins est-ce ce qu’il est supposй advenir, mais vous pourrez toujours mettre en doute la compйtence de la personne qui a rйalisй l’observation en question.

Dans la pratique, il arrive souvent qu’une nouvelle thйorie soit rйellement une extension de la thйorie prйcйdente. Par exemple, des observations trиs prйcises de la planиte Mercure ont rйvйlй de lйgиres diffйrences entre son mouvement et les prйdictions newtoniennes de la thйorie de la gravitation. La thйorie de la Relativitй Gйnйrale d’Einstein annonзait un mouvement lйgиrement diffйrent de celui de la thйorie de Newton. Le fait que les prйdictions d’Einstein s’accordent а ce que l’on voyait, alors que celles de Newton ne le faisaient pas, fut l’une des confirmations cruciales de la nouvelle thйorie. Cependant, nous utilisons toujours la thйorie de Newton dans notre pratique quotidienne, car la diffйrence entre ses prйdictions et celles de la Relativitй Gйnйrale est minime dans les situations auxquelles nous avons affaire normalement. (La thйorie de Newton a aussi le grand avantage d’кtre plus aisйe а manipuler que celle d’Einstein!).

L’ultime but de la science est de fournir une thйorie unique qui dйcrive l’Univers dans son ensemble. Cependant, la plupart des scientifiques scindent le problиme en deux. D’un cфtй, il y a les lois de la physique qui nous disent comment l’Univers йvolue avec le temps. (Si nous savons а quoi ressemble l’Univers а chaque instant donnй, ces lois physiques nous disent а quoi il ressemblera l’instant d’aprиs.) De l’autre, il y a la question de son йtat initial. Certains estiment que la science ne devrait s’occuper que du premier aspect de la question et considиrent le problиme de la situation initiale de l’Univers comme du ressort de la mйtaphysique ou de la religion. Ce qui signifierait que Dieu, йtant omniprйsent, aurait pu faire dйmarrer l’Univers а sa guise. Peut-кtre en est-il ainsi mais, dans ce cas, Dieu aurait dы aussi le dйvelopper d’une faзon complиtement arbitraire. Pourtant, il apparaоt qu’il a choisi de le faire йvoluer d’une faзon trиs rйguliиre, selon certaines lois. Il semble donc tout aussi raisonnable de supposer qu’il y a йgalement des lois qui gouvernent son йtat initial.

On se rend compte qu’il est trиs difficile de concevoir une thйorie qui dйcrive l’Univers d’un seul coup. А la place, on choisit de morceler le problиme et d’inventer un certain nombre de thйories partielles; chacune d’elles dйcrivant et prйdisant une certaine classe limitйe d’observations, nйgligeant les effets de quantitйs autres, ou les reprйsentant par de simples sйries de nombres. Il se peut que cette approche soit complиtement fausse. Si tout dans l’univers dйpend de tout de faзon fondamentale, il pourrait кtre impossible d’approcher une solution gйnйrale en traitant sйparйment les diffйrentes parties du problиme. Nйanmoins, c’est assurйment de cette faзon que nous avons accompli quelques progrиs dans le passй. L’exemple classique est encore celui de la thйorie newtonienne de la gravitation, qui nous dit que la force gravitationnelle entre deux corps ne dйpend que d’un nombre associй а chacun, leur masse, et est indйpendante de ce dont ces corps sont constituйs. Aussi n’a-t-on pas besoin d’avoir une thйorie de la structure et de la constitution du Soleil et des planиtes pour calculer leurs orbites.

Aujourd’hui, les savants dйcrivent l’Univers d’aprиs deux thйories partielles de base, la thйorie de la Relativitй Gйnйrale et la Mйcanique Quantique. Ce sont les grandes rйussites intellectuelles de la premiиre moitiй de ce siиcle. La Relativitй Gйnйrale dйcrit la force de gravitй et la structure а grande йchelle de l’univers, c’est-а-dire la structure а des йchelles allant de quelques kilomиtres а un million de milliards de milliards de kilomиtres (un 1 suivi de 24 zйros), dimension de l’univers observable. La Mйcanique Quantique, elle, s’intйresse а des phйnomиnes а йchelle extrкmement rйduite, comme le millioniиme de millioniиme du centimиtre. Malheureusement, ces deux thйories sont rйputйes incompatibles et ne peuvent donc кtre justes en mкme temps. L’un des plus grands efforts en physique aujourd’hui, et le thиme majeur de ce livre, porte sur la recherche d’une nouvelle thйorie qui les engloberait toutes les deux – une thйorie quantique de la gravitation. Nous n’en disposons pas encore et il nous reste un long chemin а parcourir, mais nous connaissons dйjа un grand nombre des propriйtйs qu’elle devra satisfaire. Et nous verrons, dans les chapitres suivants, tout ce que nous savons dйjа quant aux prйdictions qu’une telle thйorie devrait йnoncer.

Si vous pensez que l’Univers n’est pas arbitraire mais qu’il est rйgi par des lois prйcises, vous devrez en fin de compte combiner les thйories partielles en une thйorie complиtement unifiйe qui dйcrira tout dans l’univers. Seulement, il y a un paradoxe fondamental dans la recherche d’une telle thйorie complиtement unifiйe. Les notions relatives aux thйories scientifiques que nous avons exposйes plus haut supposent que nous sommes des кtres rationnels, libres d’observer l’Univers comme nous le voulons et de tirer des dйductions logiques а partir de ce que nous voyons. Dans un tel schйma, il paraоt raisonnable de supposer que nous avons pu nous rapprocher de plus en plus des lois qui rйgissent notre Univers. Pourtant, s’il existe vraiment une thйorie complиtement unifiйe, elle devrait aussi vraisemblablement dйterminer nos actions. Et ainsi, la thйorie elle-mкme devrait dйterminer l’aboutissement de notre recherche la concernant! Et pourquoi dйterminerait-elle que nous arrivons aux bonnes conclusions? Ne pourrait-elle pas aussi bien dйterminer le contraire? Ou que nous n’arriverons а rien?

La seule rйponse que je puisse apporter а ce problиme repose sur le principe de la sйlection naturelle de Darwin. L’idйe est la suivante: dans toute population d’organismes capables de s’auto-reproduire, il y aura des variations dans le matйriel gйnйtique et dans l’йducation de chaque individu. Ces diffйrences signifieront que certains d’entre eux seront plus aptes que d’autres а tirer les bonnes conclusions quant au monde qui les entoure, et а agir en consйquence. Ayant plus de chances que les autres de survivre et de se reproduire, leurs types de comportement et de pensйe deviendront dominants. Il a certainement йtй vrai, dans le passй, que ce que nous appelons intelligence et dйcouverte scientifique ont constituй un avantage en faveur d’une survie. Il n’est pas йvident que cela soit encore le cas de nos jours: nos dйcouvertes scientifiques peuvent nous dйtruire et, mкme si elles ne le font pas, une thйorie complиtement unifiйe ne changera pas grand-chose а la situation. Cependant, а condition que l’Univers йvolue de faзon rйguliиre, nous devrions nous attendre а ce que les capacitйs de raisonnement dont la sйlection naturelle nous a pourvus soient йgalement valables dans notre recherche d’une thйorie complиtement unifiйe, et donc qu’elles ne nous conduisent pas а des conclusions fausses.

Comme les thйories partielles dont nous disposons dйjа sont suffisantes pour faire des prйdictions exactes dans toutes les situations sauf les plus extrкmes, la recherche de la thйorie fondamentale de l’univers semble difficile а justifier au niveau pratique. (Il vaut la peine de noter, cependant, que des arguments semblables auraient pu кtre utilisйs а la fois contre la Relativitй et la mйcanique quantique, et que ces thйories nous ont donnй а la fois l’йnergie nuclйaire et la rйvolution de la microйlectronique!)

La dйcouverte d’une thйorie complиtement unifiйe, donc, peut ne pas venir en aide а la survie de notre espиce. Elle peut mкme ne pas affecter du tout notre mode de vie. Mais jamais, depuis l’aube de la civilisation, les hommes ne se sont accommodйs d’йvйnements hors cadre et inexplicables. Ils ont toujours eu soif de comprendre l’ordre sous-jacent dans le monde. Aujourd’hui, nous avons encore trиs envie de savoir pourquoi nous sommes lа et d’oщ nous venons. Ce dйsir de savoir, chevillй а l’humanitй, est une justification suffisante pour que notre quкte continue. Et notre but n’est rien moins qu’une description complиte de l’Univers dans lequel nous vivons.


Дата добавления: 2015-10-26; просмотров: 149 | Нарушение авторских прав


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