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mistral (1830-1914) est le plus fameux parmi les Félibres (poètes) de
Provence. Il a milité de la façon la plus efficace pour la renaissance du
provençal littéraire en composant lui-même des chefs-d'œuvre. Son роеme
Mirèio (Mireille), qui devait inspirer l'opéra de Gounod, souleva
l'enthousiasme de Lamartine: le poète romantique retrouvait chez le poète de
langue d'oc la grandeur et l'harmonie si naturelles chez lui-même.
On lira à la page suivante un des plus fameux poèmes de Mistral: cette Coupe
sainte qu 'il dédia aux poètes catalans lorsque ceux-ci envoyèrent aux Féhbres
une coupe d'argent ciselé.
LA COUPO LA COUPE
Prouvençau, voici la coupo Provençaux, voici la coupe
Que nous vèn di Catalan: Qui nous vient des Catalans:
A-de-rèng beguen en troupo Tour à tour buvons ensemble
Lou vin pur de noste plant! Le vin pur de notre cru.
Coupo santo, Coupe sainte,
E versante, Et débordante
Vuejo à plen bord, Verse à pleins bords,
Vuejo abord Verse à flots
Lis estrambord Les enthousiasmes
E l'enavans di fort! Et l'énergie des forts!
D'un vièi pople fier e libre D'un ancien peuple fier et libre
Sian bessai la finicioun; Nous sommes peut-être la fin;
E, se toumbon li Felibre, Et, si les Félibres tombent,
Toumbara nosto nacioun. Notre nation tombera.
Coupo santo, etc. Coupe sainte, etc.
D'une raço que regreio D'une race qui regerme
Sian bessai li proumié gréu; Peut-être sommes-nous les premiers jef>
Sian bessai de la patrio De la patrie, peut-être, nous sommes
Li cepoun emai li priéu. Les piliers et les chefs.
Coupo santo, etc. Coupe sainte, etc.
Vuejo-nous lis espérance Verse-nous les espérances
E li raive dou jouvènt Et les rêves de la jeunesse,
Dou passât la remembranço Le souvenir du passé
E la fe dins l'an que vèn. Et la foi dans l'an qui vient.
Coupo santo, etc. Coupe sainte, etc.
Vuejo-nous la couneissènço Verse-nous la connaissance
Dou Verai emai dou Bèu, Du Vrai comme du Beau
E lis àuti jouïssènço Et les hautes jouissances
Que se trufon dou toumbèu Qui se rient de la tombe.
Coupo santo, etc. Coupe sainte, etc.
Vuejo-nous la Pouësio Verse-nous la Poésie
pèr canta tout ço que viéu, Pour ctlanter tout ce qui vit,
Car es elo l'ambrousio Car c'est elle l'ambroisie
Que tremudo l'orne en dieu Qui transforme l'homme en dieu.
Coupo santo, etc. Coupe sainte, etc.
pèr la glôri dou terraire, Pour la gloire du pays,
Vautre enfin que sias counsènt Vous, enfin, nos complices,
Catalan, de liuen, о fraire, Catalans, de loin, о frères,
Communien toutis ensèn! Tous ensemble, communions!
Coupo santo Coupe sainte
E versanto Et débordante
Vuejo à plen bord, Verse à pleins bords,
Vuejo abord Verse à flots
Lis estrambord Les enthousiasmes
E l'enavans di fort! Et l'énergie des forts.
FRÉDÉRIC MISTRAL. Les Iles d'Or. Écrit en 1867.
(Traduction de Mistral, revue par Ch.-P. Jullianet P. Fontan.)
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