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LE GROUPE DES SIX

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  1. Les verbes du IIIe groupe

de même que l'auteur de Pelléas et Mélisande avait moins réagi contre
Wagner que contre le wagnérisme, les musiciens de la génération suivante
furent moins les adversaires de Debussy que du debussysme. Aussi fut-ce
surtout far une réaction bien naturelle et -pour souligner leur indépendance
que les plus marquants d'entre eux furent amenés à se réunir pour former ce
qu'on a appelé depuis «le Groupe des Six».

ENTRETIEN AVEC FRANCIS POULENC (né en 1899)

On trouvera ici un extrait des Entretiens qu'en 1952 le critique musical Claude Rostand
eut, à la Radio, avec le compositeur Francis Poulenc.

CLAUDE ROSTAND. — Comment avez-vous connu vos camarades du
Groupe des Six?

FRANCIS POULENC. — Avec une rare logique, j'ai connu d'abord celui
qui est devenu depuis mon frère spirituel: j'ai nommé Georges Auric. Nous
avons exactement le même âge, je suis son aîné d'à peine un mois, mais,
intellectuellement, je me suis toujours senti son cadet.


La précocité d'Auric était telle, dans tous les domaines, qu'à quatorze
ans on le jouait à la Société Nationale de Musique. A quinze, il discutait
sociologie avec Léon Bloy, théologie avec Maritain, et à dix-sept ans,
Apollinaire lui lisait les Mamelles de Tirésias1 en lui demandant son avis.

Vinès", avec son intelligence d'insecte, comprit tout de suite que nous
étions faits l'un pour l'autre, et il y avait tout juste deux mois que je prenais
mes leçons de piano avec lui, qu'il me présenta à Georges Aude. Ceci se
passait en 1916, si j'ai bonne mémoire.

Auric habitait alors à Montmartre, derrière le Sacré-Cœur, rue Lamarck.

Je revois avec émotion les moindres détails de sa chambre. Sur un
piano, rarement accordé, au toucher capricieux, une montagne de musique
s'accumulait, qui témoignait d'un parfait éclectisme, allant des
polyphonistes du XVIe siècle aux opérettes de Messager, en passant par le
Pierrot lunaire d'Arnold Schônberg et l'Allégro Barbara de Bartok...

Tout dans la vie a contribué à nous faire vivre parallèlement, Auric et
moi: nous avons créé les Noces de Strawinsky ensemble. Nous avons fait
partie tous deux de l'équipe de Diaghiiew3, nous nous sommes partagé
l'affection d'un Paul Eluard, et que sais-je encore!..

CLAUDE ROSTAND. — En effet, ce que vous dites est très frappant. Du
moins, j'ai toujours été frappé, en assistant à une conversation entre Auric
et vous, par cette sorte de complicité secrète qui existe entre vous deux, et
dans laquelle il semble impossible de s'introduire... Mais après Auric?..

FRANCIS POULENC. — Le second des Su; que j'ai connu, c'est Arthur
Honegger, en 1917, chez Jeanne Bathori...

Chère grande Jeanne Bathori, que n'a-t-elle pas fait pour la musique
moderne! Première interprète de Debussy, Ravel, Fauré, Roussel, Satie,
Milhaud, et de tant d'autres, elle réunissait dans son atelier du boulevard
Pereire les jeunes musiciens désireux de se rencontrer ou de se connaître.

André Caplet4, récemment revenu du front, dirigeait parfois, chez elle,
une étrange chorale où l'on voyait, parmi les basses, mes deux maîtres,
Ricardo Vinès et Charles Kœchlin5, et, dans je ne sais plus quel emploi:
Honegger et moi-même. Il s'agissait de chanter les Trois Chansons
a capella6 de Ravel, encore inédites.

Le résultat n'était pas. brillant, mais la bonne volonté y était.

Les premières fois, Honegger m'intimida malgré ce bon sourire
d'accueil si jovial qu'il a toujours gardé, mais je ne tardai pas à me
familiariser avec lui et tout alla au mieux lorsque je le vis dans Le Jeu de
Rotin et de Marion,
monté par Bathori au Vieux-Colombier7, déguisé en
tambourinaire par son ami le peintre Ochsé. Une douée jeune fille au


visage préraphaélique l'accompagnait toujours. Cette douce jeune fille, si
modestement savante, est devenue, depuis lors, son épouse. J'ai toujours
conservé pour elle une tendre affection...

CLAUDE ROSTAND. — Et ensuite?

FRANCIS POULENC. — A la même époque, j'ai connu Germaine
Tailleferre et Louis Durey. Qu'elle était ravissante en 7977 notre Germaine,
avec son cartable d'écolière plein de tous les premiers prix du
Conservatoire8! Qu'elle était gentille et douée! Elle l'est toujours, mais je
regrette un peu que, par excès de modestie, elle n'ait pas sorti d'elle-même
tout ce qu'une Marie Laurencin9 par exemple a su tirer de son génie
féminin...

Louis Durey, le loyal Durey, qui, par je ne sais quel scrupule, se sépara
de nous au moment où Les Mariés de la Tour Eiffel 'Consacraient, d'une
façon éphémère, notre groupe arbitraire, Louis Durey, le silencieux Durey,
est l'image même de la modestie et de la noblesse. Je lui dédiai mes
premières mélodies. Le Bestiaire ", que j'avais composé, sans le savoir, en
même temps que le sien. J'aimerais qu'on voie, dans ce sensible hommage,
la tendre estime dans laquelle je l'ai toujours tenu.

CLAUDE ROSTAND. — Et Milhaud, notre Darius, qu'attendez-vous pour
en parler?

FRANCIS POULENC. — Soyez patient: j'ai adopté l'ordre chronologique,
et n'oubliez pas qu'au début, Milhaud ne faisait que virtuellement partie de
notre groupe puisque, en 1917, il était encore au Brésil avec Paul Claudel...

Lorsqu'il en revint, j'eus littéralement le coup de foudre, ce qui est aussi
valable en amitié qu'en amour. Qu'il était séduisant, ce robuste
Méditerranéen, appuyé sur une fine canne de rhinocéros, habillé de gris
clair, avec des cravates fraise et citron! Qu'il était amusant avec ses
histoires des tropiques, et que c'était délicieux de l'entendre jouer, avec ce
toucher adorablement négligent, ses albums de voyage: Saudades do Brazil
ou Le Bœuf sur le Toit!..

Avec les années, j'admire de plus en plus l'œuvre de Milhaud. Qu'il est
loin le temps où j'écrivais à Sauguet une lettre injuste et sotte sur La
Création du Monde,
lettre que le cher Darius eut l'indiscrétion de lire, un
jour où elle tramait sur la table de Sauguet1!

En réentendant, l'hiver passé. La Création, j'en admirais, au contraire, la
beauté sans rides, sans tics d'époque.

CLAUDE ROSTAND. — Maintenant que vous avez nommé les «Six»,
parlez-nous donc du Groupe des Six.

FRANCIS POULENC. — Six musiciens ayant été plusieurs fois réunis, par


la grâce de Jeanne Bathori au Vieux-Colombier et de Félix Delgrange
à Lyre et Palette, Henri Collet, critique de Comœdia", nous baptisa les six
Français, à l'instar des cinq Russes fameux14. Le slogan était facile mais, la
jeunesse étant friande de publicité, nous acceptâmes une étiquette qui, au
fond, ne signifiait pas grand-chose. La diversité de nos musiques, de nos
goûts et dégoûts, démentait une esthétique commune. Quoi de plus opposé
que les musiques d'Honegger et d'Auric? Milhaud admirait Magnard'15 moi
pas; nous n'aimions ni l'un ni l'autre Florent Schmitt16 qu'Honeggei
respectait; Arthur, par contre, méprisait, au fond de lui-même, Satie17,
qu'Auric, Milhaud et moi adorions... On voit du coup que le Groupe des
Six
n'était pas un groupe esthétique, mais une simple association amicale*.

FRANCIS POULENC. Entretiens avec Claude Rostand (1952).

Примечания:

1. Положенные на музыку Эриком Сати. 2. Рикардо Виньес, знаменитый испан-
ский пианист, большой друг Дебюсси. 3. Сергея Дягилева, прославленного руководи-
теля русского балета. 4. Автор, в частности, "Зеркала Иисуса". 5. Композитор и теоре-
• тик музыки. 6. То есть без музыкального сопровождения. 7. Театр в Париже, основан
в 1913 г. Жаком Копо. 8. Высшая школа музыки и декламации. 9. Знаменитая худож-
ница (1885 -1956). 10. Текст Жана Кокто. 11. На стихи Аполлинера. 12. Анри Соге.
один из самых популярных композиторов той эпохи. 13. Газета, посвященная искус-
ству. 14. Римский-Корсаков, Мусоргский, Балакирев, Бородин и Цезарь Кюи
15. Автора "Геркёра". 16. Автора "Трагедии о Саломее" 17. Эрика Сати, автора, в
частности, "Парада", "реалистического балета" на сюжет Жана Кокто.

Вопросы:

* Qu'est-ce qui fait ^intérêt principal de ce texte?


Дата добавления: 2015-08-02; просмотров: 41 | Нарушение авторских прав


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LES NYMPHÉAS1 OU LES SURPRISES D'UNE AUBE D'ETE| UN CINÉASTE FRANÇAIS; RENÉ CLAIR

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