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JACQUES. 1 AN

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Je vis ma vie de bébé.

Je n'aime pas quand les parents m'attrapent sous les bras. J'aime quand ils me saisissent par le siège et que je peux m'asseoir dans la paume de leurs mains.

Papa me lance souvent en l'air. Je risque de m'écra-ser au plafond. Ça me fait peur. Pourquoi les papas se sentent-ils obligés de lancer leurs gosses en l'air?

Tout m'angoisse. J'ai envie de me cacher sous les couvertures et que les autres me laissent en paix.

Une petite fille m'a été présentée comme étant ma sœur. Elle a l'air contente de me voir car elle n'arrête pas de me mettre des choses dans la bouche en me disant: «Allez, bébé, il faut manger.» Elle me cale dans la poussette de sa poupée et court partout en hurlant: «Bébé est sale! Il faut lui donner un bain et lui shampouiner les yeux!»

Elle n'est pas la seule fillette ici à se prétendre ma sœur. Il y en a d'autres, que je perçois comme autant de présences intéressantes, mais potentiellement dangereuses. Certaines m'appliquent des bisous, d'autres me tirent les cheveux. Il y en a qui me donnent le biberon et d'autres qui me font des chatouilles.

J'ai découvert que, dans la famille, nous avions aussi un chat. Il m'apparaît comme étant l'entité la plus sereine de la maison. Sa fourrure est aussi veloutée que la peluche de mes nounours et il en sort un bruit de ronronnement grave qui me plaît.

Mes sœurs essaient de me montrer comment marcher. Je suis déjà tombé une fois et le souvenir de mes bleus me rend méfiant quant à de nouvelles tentatives. La station debout m'inquiète. À quatre pattes, on chute de moins haut.

À part le chat, comme éléments rassurants dans la maisonnée, il y a aussi le pot et la télévision. Lorsque je suis sur le pot, personne ne vient me déranger. La télé, elle, a pour propriété de bouger tout le temps et, en plus, elle ronronne comme le chat.

À la télé, il y a des histoires en permanence. J'adore les histoires. Elles me font oublier mes angoisses.

VENUS. 1 AN

Je suis couverte de baisers et d'attentions. Ma mère me répète que je suis la plus belle petite fille du monde. Je me suis vue dans le miroir et, en effet, je suis ravissante. J'ai de longs cheveux d'ébène, ma peau couleur de miel est fine et douce comme de la soie, et mes yeux sont vert clair. Il paraît qu'à ma naissance, au contraire des autres bébés, je n'étais même pas chiffonnée. Maman m'a expliqué que c'est parce que je suis sortie directement de son ventre sans qu'elle ait eu d'efforts à faire pour m'en expulser.

À part ça, ils m'ont présenté un vieux monsieur, le père de maman. Ils l'appellent «pépé», et pépé m'accable de bisous mouillés. Je déteste les bisous mouillés. Pour s'autoriser des trucs aussi baveux, il doit être vraiment en manque d'affection.

Le soir, j'exige qu'on allume une veilleuse près de mon lit pour ne pas être plongée dans l'obscurité. Sinon, j’ai l'impression que quelqu'un de malfaisant se dissimule sous le sommier et qu'il va m'attraper par les pieds.

Je ne supporte pas non plus qu'on m'enveloppe dans une couverture. J'ai besoin d'avoir toujours les jambes à l'air. Sinon ça m'énerve, ça m'énerve. En plus, si le monstre de sous le lit surgit tout à coup, je me retrouverai coincée et je ne pourrai pas m'enfuir.

Je ne mange pas de tout. Je ne supporte que le doux et le sucré. J'aime ce qui est beau, gentil, sucré.

IGOR. 1 AN

Il faut que je survive à ma mère.

Je lui échappe dans la baignoire où elle cherche à me noyer. Je lui échappe dans le lit où elle cherche à m'étouffer avec un oreiller.

Je sais être glissant.

Je sais prévenir les menaces.

Je sais me réveiller la nuit à la moindre lueur.

Je sais, grâce à mon ouïe très fine, deviner quand elle surgit derrière moi. Je sais être leste et rapide.

J'apprends vite à marcher.

Pour mieux fuir.

33. ENCYCLOPÉDIE

INSTINCT MATERNEL: Beaucoup s'imaginent que l'amour maternel est un sentiment humain naturel et automatique. Rien de plus faux. Jusqu'à la fin du dix-neuvième siècle, la plupart des femmes appartenant à la bourgeoisie occidentale plaçaient leurs enfants en nourrice et ne s'en occupaient plus.

Les paysannes n'étaient guère plus attentionnées. On emmaillotait les bébés dans des langes très serrés puis on les accrochait au mur pas trop loin de la cheminée afin qu'ils n'aient pas froid.

Le taux de mortalité infantile étant très élevé, les parents étaient fatalistes, sachant qu'il n'y avait qu'une chance sur deux pour que leurs enfants survivent jusqu'à l'adolescence.

Ce n'est qu'au début du vingtième siècle que les gouvernements ont compris l'intérêt économique, social et militaire de ce fameux «instinct maternel». En particulier lors de recensements de la population, car on s'aperçut alors du grand nombre d'enfants mal nourris, maltraités, battus. À la longue, les conséquences risquaient d'être lourdes pour l'avenir d'un pays. On développa l'information, la prévention, et, peu à peu, les progrès de la médecine en matière de maladies infantiles permirent d'affirmer que les parents pouvaient dorénavant s'investir affectivement dans leurs enfants sans crainte de les perdre prématurément. On mit donc à l'ordre du jour l'«instinct maternel».

Un nouveau marché naquit peu à peu: couches-culottes, biberons, laits maternisés, petits pots, jouets. Le mythe du Père Noël se répandit dans le monde.

Les industriels de l'enfance, au travers de multiples réclames, créèrent l'image de mères responsables, et le bonheur de l'enfant devint une sorte d'idéal moderne.

Paradoxalement, c'est au moment où l'amour maternel s'affiche, se revendique et s'épanouit, devenant le seul sentiment incontestable dans la société, que les enfants, une fois grands, reprochent constamment à leur mère de ne pas s'être suffisamment souciée d'eux. Et, plus tard, ils déversent… chez un psychanalyste leurs ressentiments et leurs rancœurs envers leur génitrice.

 

Edmond Wells, Encyclopédie du Savoir Relatif et Absolu, tome IV.


Дата добавления: 2015-11-13; просмотров: 60 | Нарушение авторских прав


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