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Chapitre XXIX. L’Ennui

Chapitre XVIII. Moments cruels | Chapitre XIX. L’Opйra Bouffe | Chapitre XX. Le Vase du Japon | Chapitre XXI. La Note secrиte | Chapitre XXII. La Discussion | Chapitre XXIII. Le Clergй, les Bois, la Libertй | Chapitre XXIV. Strasbourg | Chapitre XXV. Le Ministиre de la vertu | Chapitre XXVI. L’Amour moral | Chapitre XXVII. Les plus belles Places de l’Йglise |


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  6. Chapitre III. Le Bien des pauvres
  7. Chapitre III. Les Premiers pas

 

Se sacrifier а ses passions, passe; mais а des passions qu’on n’a pas! Ф triste dix-neuviиme siиcle!

 

GIRODET.

 

Aprиs avoir lu sans plaisir d’abord les longues lettres de Julien, Mme de Fervaques commenзait а en кtre occupйe; mais une chose la dйsolait: Quel dommage que M. Sorel ne soit pas dйcidйment prкtre! On pourrait l’admettre а une sorte d’intimitй; avec cette croix et cet habit presque bourgeois, on est exposй а des questions cruelles, et que rйpondre? Elle n’achevait pas sa pensйe: quelque amie maligne peut supposer et mкme rйpandre que c’est un petit cousin subalterne, parent de mon pиre, quelque marchand dйcorй par la garde nationale.

 

Jusqu’au moment oщ elle avait vu Julien, le plus grand plaisir de Mme de Fervaques avait йtй d’йcrire le mot marйchale а cфtй de son nom. Ensuite une vanitй de parvenue, maladive et qui s’offensait de tout, combattit un commencement d’intйrкt.

 

Il me serait si facile, se disait la marйchale, d’en faire un grand vicaire dans quelque diocиse voisin de Paris! Mais M. Sorel tout court, et encore petit secrйtaire de M. de La Mole! c’est dйsolant.

 

Pour la premiиre fois, cette вme qui craignait tout йtait йmue d’un intйrкt йtranger а ses prйtentions de rang et de supйrioritй sociale. Son vieux portier remarqua que, lorsqu’il apportait une lettre de ce beau jeune homme, qui avait l’air si triste, il йtait sыr de voir disparaоtre l’air distrait et mйcontent que la marйchale avait toujours soin de prendre а l’arrivйe d’un de ses gens.

 

L’ennui d’une faзon de vivre toute ambitieuse d’effet sur le public, sans qu’il y eыt au fond du cњur jouissance rйelle pour ce genre de succиs, йtait devenu si intolйrable depuis qu’on pensait а Julien, que pour que les femmes de chambre ne fussent pas maltraitйes de toute une journйe, il suffisait que pendant la soirйe de la veille on eыt passй une heure avec ce jeune homme singulier. Son crйdit naissant rйsista а des lettres anonymes fort bien faites. En vain le petit Tanbeau fournit а MM. de Luz, de Croisenois, de Caylus, deux ou trois calomnies fort adroites, et que ces Messieurs prirent plaisir а rйpandre sans trop se rendre compte de la vйritй des accusations. La marйchale, dont l’esprit n’йtait pas fait pour rйsister а ces moyens vulgaires, racontait ses doutes а Mathilde, et toujours йtait consolйe.

 

Un jour, aprиs avoir demandй trois fois s’il y avait des lettres, Mme de Fervaques se dйcida subitement а rйpondre а Julien. Ce fut une victoire de l’ennui. А la seconde lettre, la marйchale fut presque arrкtйe par l’inconvenance d’йcrire de sa main une adresse aussi vulgaire, А M. Sorel, chez M. le marquis de La Mole.

 

Il faut, dit-elle le soir а Julien d’un air fort sec, que vous m’apportiez des enveloppes sur lesquelles il y aura votre adresse.

 

Me voilа constituй amant valet de chambre, pensa Julien, et il s’inclina en prenant plaisir а se grimer comme Arsиne, le vieux valet de chambre du marquis.

 

Le soir mкme, il apporta des enveloppes, et le lendemain de fort bonne heure, il eut une troisiиme lettre: il en lut cinq ou six lignes au commencement, et deux ou trois vers la fin. Elle avait quatre pages d’une petite йcriture fort serrйe.

 

Peu а peu on prit la douce habitude d’йcrire presque tous les jours. Julien rйpondait par des copies fidиles des lettres russes, et tel est l’avantage du style emphatique: Mme de Fervaques n’йtait point йtonnйe du peu de rapport des rйponses avec ses lettres.

 

Quelle n’eыt pas йtй l’irritation de son orgueil si le petit Tanbeau, qui s’йtait constituй espion volontaire des dйmarches de Julien, eыt pu lui apprendre que toutes ces lettres non dйcachetйes йtaient jetйes au hasard dans le tiroir de Julien.

 

Un matin, le portier lui apportait dans la bibliothиque une lettre de la marйchale; Mathilde rencontra cet homme, vit la lettre et l’adresse de l’йcriture de Julien. Elle entra dans la bibliothиque comme le portier en sortait; la lettre йtait encore sur le bord de la table; Julien, fort occupй а йcrire, ne l’avait pas placйe dans son tiroir.

 

– Voilа ce que je ne puis souffrir, s’йcria Mathilde en s’emparant de la lettre; vous m’oubliez tout а fait, moi qui suis votre йpouse. Votre conduite est affreuse, Monsieur.

 

А ces mots, son orgueil, йtonnй de l’effroyable inconvenance de sa dйmarche, la suffoqua; elle fondit en larmes, et bientфt parut а Julien hors d’йtat de respirer.

 

Surpris, confondu, Julien ne distinguait pas bien tout ce que cette scиne avait d’admirable et d’heureux pour lui. Il aida Mathilde а s’asseoir; elle s’abandonnait presque dans ses bras.

 

Le premier instant oщ il s’aperзut de ce mouvement, fut de joie extrкme. Le second fut une pensйe pour Korasoff: je puis tout perdre par un seul mot.

 

Ses bras se raidirent, tant l’effort imposй par la politique йtait pйnible. Je ne dois pas mкme me permettre de presser contre mon cњur ce corps souple et charmant, ou elle me mйprise et me maltraite. Quel affreux caractиre!

 

Et en maudissant le caractиre de Mathilde, il l’en aimait cent fois plus; il lui semblait avoir dans ses bras une reine.

 

L’impassible froideur de Julien redoubla le malheur d’orgueil qui dйchirait l’вme de Mlle de La Mole. Elle йtait loin d’avoir le sang-froid nйcessaire pour chercher а deviner dans ses yeux ce qu’il sentait pour elle en cet instant. Elle ne put se rйsoudre а le regarder; elle tremblait de rencontrer l’expression du mйpris.

 

Assise sur le divan de la bibliothиque, immobile et la tкte tournйe du cфtй opposй а Julien, elle йtait en proie aux plus vives douleurs que l’orgueil et l’amour puissent faire йprouver а une вme humaine. Dans quelle atroce dйmarche elle venait de tomber!

 

Il m’йtait rйservй, malheureuse que je suis! de voir repousser les avances les plus indйcentes! et repoussйes par qui? ajoutait l’orgueil fou de douleur, repoussйes par un domestique de mon pиre.

 

– C’est ce que je ne souffrirai pas, dit-elle а haute voix.

 

Et, se levant avec fureur, elle ouvrit le tiroir de la table de Julien placйe а deux pas devant elle. Elle resta comme glacйe d’horreur en y voyant huit ou dix lettres non ouvertes, semblables en tout а celle que le portier venait de monter. Sur toutes les adresses, elle reconnaissait l’йcriture de Julien, plus ou moins contrefaite.

 

– Ainsi, s’йcria-t-elle hors d’elle-mкme, non seulement vous кtes bien avec elle, mais vous encore la mйprisez. Vous, un homme de rien mйpriser Mme la marйchale de Fervaques!

 

Ah! pardon, mon ami, ajouta-t-elle en se jetant а ses genoux, mйprise-moi si tu veux, mais aime-moi, je ne puis plus vivre privйe de ton amour. Et elle tomba tout а fait йvanouie.

 

La voilа donc, cette orgueilleuse, а mes pieds! se dit Julien.


Дата добавления: 2015-11-14; просмотров: 53 | Нарушение авторских прав


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