Студопедия
Случайная страница | ТОМ-1 | ТОМ-2 | ТОМ-3
АрхитектураБиологияГеографияДругоеИностранные языки
ИнформатикаИсторияКультураЛитератураМатематика
МедицинаМеханикаОбразованиеОхрана трудаПедагогика
ПолитикаПравоПрограммированиеПсихологияРелигия
СоциологияСпортСтроительствоФизикаФилософия
ФинансыХимияЭкологияЭкономикаЭлектроника

Chapitre XV. Est-ce un complot ?

Chapitre IV. L’Hфtel de La Mole | Chapitre V. La Sensibilitй et une grande Dame dйvote | Chapitre VI Maniиre de prononcer | Chapitre VII. Une attaque de goutte | Chapitre VIII. Quelle est la dйcoration qui distingue ? | Chapitre IX. Le Bal | Chapitre X. La Reine Marguerite | Chapitre XI. L’Empire d’une jeune fille! | Chapitre XII. Serait-ce un Danton ? | Chapitre XIII. Un complot |


Читайте также:
  1. Chapitre I La ligne
  2. Chapitre II Les camarades
  3. Chapitre II. Entrйe dans le monde
  4. Chapitre II. Un maire
  5. Chapitre III L’Avion
  6. Chapitre III. Le Bien des pauvres
  7. Chapitre III. Les Premiers pas

 

Ah! que l’intervalle est cruel entre un grand projet conзu et son exйcution! Que de vaines terreurs! que d’irrйsolutions! Il s’agit de la vie. – Il s’agit de bien plus: de l’honneur!

 

SCHILLER.

 

Ceci devient sйrieux, pensa Julien… et un peu trop clair, ajouta-t-il aprиs avoir pensй. Quoi! cette belle demoiselle peut me parler dans la bibliothиque avec une libertй qui, grвce а Dieu, est entiиre; le marquis, dans la peur qu’il a que je ne lui montre des comptes, n’y vient jamais. Quoi! M. de La Mole et le comte Norbert, les seules personnes qui entrent ici, sont absents presque toute la journйe; on peut facilement observer le moment de leur rentrйe а l’hфtel, et la sublime Mathilde, pour la main de laquelle un prince souverain ne serait pas trop noble, veut que je commette une imprudence abominable!

 

C’est clair, on veut me perdre ou se moquer de moi, tout au moins. D’abord, on a voulu me perdre avec mes lettres; elles se trouvent prudentes; eh bien! il leur faut une action plus claire que le jour. Ces jolis petits messieurs me croient aussi trop bкte ou trop fat. Diable! par le plus beau clair de lune du monde, monter ainsi par une йchelle а un premier йtage de vingt-cinq pieds d’йlйvation! on aura le temps de me voir, mкme des hфtels voisins. Je serai beau sur mon йchelle! Julien monta chez lui et se mit а faire sa malle en sifflant. Il йtait rйsolu а partir et а ne pas mкme rйpondre.

 

Mais cette sage rйsolution ne lui donnait pas la paix du cњur. Si par hasard, se dit-il tout а coup, sa malle fermйe, Mathilde йtait de bonne foi! alors moi je joue, а ses yeux, le rфle d’un lвche parfait. Je n’ai point de naissance, moi, il me faut de grandes qualitйs, argent comptant, sans suppositions complaisantes, bien prouvйes par des actions parlantes…

 

Il fut un quart d’heure а rйflйchir. А quoi bon le nier? dit-il enfin; je serai un lвche а ses yeux. Je perds non seulement la personne la plus brillante de la haute sociйtй, ainsi qu’ils disaient tous au bal de M. le duc de Retz, mais encore le divin plaisir de me voir sacrifier le marquis de Croisenois, le fils d’un duc, et qui sera duc lui-mкme. Un jeune homme charmant qui a toutes les qualitйs qui me manquent: esprit d’а-propos, naissance, fortune…

 

Ce remords va me poursuivre toute ma vie, non pour elle, il est tant de maоtresses!

 

… Mais il n’est qu’un honneur!

 

dit le vieux don Diиgue, et ici, clairement et nettement, je recule devant le premier pйril qui m’est offert; car ce duel avec M. de Beauvoisis se prйsentait comme une plaisanterie. Ceci est tout diffйrent. Je puis кtre tirй au blanc par un domestique, mais c’est le moindre danger; je puis кtre dйshonorй.

 

Ceci devient sйrieux, mon garзon, ajouta-t-il avec une gaietй et un accent gascons. Il y va de l’ honur. Jamais un pauvre diable, jetй aussi bas que moi par le hasard, ne retrouvera une telle occasion; j’aurai des bonnes fortunes, mais subalternes…

 

Il rйflйchit longtemps, il se promenait а pas prйcipitйs, s’arrкtant tout court de temps а autre. On avait dйposй dans sa chambre un magnifique buste en marbre du cardinal Richelieu, qui malgrй lui attirait ses regards. Ce buste avait l’air de le regarder d’une faзon sйvиre, et comme lui reprochant le manque de cette audace qui doit кtre si naturelle au caractиre franзais. De ton temps, grand homme, aurais-je hйsitй?

 

Au pire, se dit enfin Julien; supposons que tout ceci soit un piиge, il est bien noir et bien compromettant pour une jeune fille. On sait que je ne suis pas homme а me taire. Il faudra donc me tuer. Cela йtait bon en 1574, du temps de Boniface de La Mole, mais jamais celui d’aujourd’hui n’oserait. Ces gens-lа ne sont plus les mкmes. Mlle de La Mole est si enviйe! Quatre cents salons retentiraient demain de sa honte, et avec quel plaisir!

 

Les domestiques jasent, entre eux, des prйfйrences marquйes dont je suis l’objet, je le sais, je les ai entendus…

 

D’un autre cфtй, ses lettres!… ils peuvent croire que je les ai sur moi. Surpris dans sa chambre, on me les enlиve. J’aurai affaire а deux, trois, quatre hommes, que sais-je? Mais ces hommes, oщ les prendront-ils? oщ trouver des subalternes discrets а Paris? La justice leur fait peur… Parbleu! les Caylus, les Croisenois, les de Luz eux-mкmes. Ce moment, et la sotte figure que je ferai au milieu d’eux, sera ce qui les aura sйduits. Gare le sort d’Abailard, M. le secrйtaire!

 

Eh bien, parbleu! messieurs, vous porterez de mes marques, je frapperai а la figure, comme les soldats de Cйsar а Pharsale … Quant aux lettres, je puis les mettre en lieu sыr.

 

Julien fit des copies des deux derniиres, les cacha dans un volume du beau Voltaire de la bibliothиque, et porta lui-mкme les originaux а la poste.

 

Quand il fut de retour: Dans quelle folie je vais me jeter! se dit-il avec surprise et terreur. Il avait йtй un quart d’heure sans regarder en face son action de la nuit prochaine.

 

Mais, si je refuse, je me mйprise moi-mкme dans la suite! Toute la vie cette action sera un grand sujet de doute, et, pour moi, un tel doute est le plus cuisant des malheurs. Ne l’ai-je pas йprouvй pour l’amant d’Amanda! Je crois que je me pardonnerais plus aisйment un crime bien clair; une fois avouй, je cesserais d’y penser.

 

Quoi! j’aurai йtй en rivalitй avec un homme portant un des plus beaux noms de France, et je me serai moi-mкme, de gaietй de cњur, dйclarй son infйrieur! Au fond, il y a de la lвchetй а ne pas aller. Ce mot dйcide tout, s’йcria Julien en se levant… d’ailleurs elle est bien jolie!

 

Si ceci n’est pas une trahison, quelle folie elle fait pour moi!… Si c’est une mystification, parbleu! messieurs, il ne tient qu’а moi de rendre la plaisanterie sйrieuse, et ainsi ferai-je.

 

Mais s’ils m’attachent les bras au moment de l’entrйe dans la chambre; ils peuvent avoir placй quelque machine ingйnieuse!

 

C’est comme un duel, se dit-il en riant, il y a parade а tout, dit mon maоtre d’armes, mais le bon Dieu, qui veut qu’on en finisse, fait que l’un des deux oublie de parer. Du reste, voici de quoi leur rйpondre: il tirait ses pistolets de poche; et quoique l’amorce fыt fulminante, il la renouvela.

 

Il y avait encore bien des heures а attendre; pour faire quelque chose, Julien йcrivit а Fouquй: «Mon ami, n’ouvre la lettre ci-incluse qu’en cas d’accident, si tu entends dire que quelque chose d’йtrange m’est arrivй. Alors, efface les noms propres du manuscrit que je t’envoie, et fais-en huit copies que tu enverras aux journaux de Marseille, Bordeaux, Lyon, Bruxelles, etc.; dix jours plus tard, fais imprimer ce manuscrit, envoie le premier exemplaire а M. le marquis de La Mole; et quinze jours aprиs, jette les autres exemplaires de nuit dans les rues de Verriиres.»

 

Ce petit mйmoire justificatif arrangй en forme de conte, que Fouquй ne devait ouvrir qu’en cas d’accident, Julien le fit aussi peu compromettant que possible pour Mlle de La Mole, mais enfin il peignait fort exactement sa position.

 

Julien achevait de fermer son paquet, lorsque la cloche du dоner sonna; elle fit battre son cњur. Son imagination, prйoccupйe du rйcit qu’il venait de composer, йtait toute aux pressentiments tragiques. Il s’йtait vu saisi par des domestiques, garrottй, conduit dans une cave avec un bвillon dans la bouche. Lа, un domestique le gardait а vue, et si l’honneur de la noble famille exigeait que l’aventure eыt une fin tragique, il йtait facile de tout finir avec ces poisons qui ne laissent point de traces; alors, on disait qu’il йtait mort de maladie, et on le transportait mort dans sa chambre.

 

Йmu de son propre conte comme un auteur dramatique, Julien avait rйellement peur lorsqu’il entra dans la salle а manger. Il regardait tous ces domestiques en grande livrйe. Il йtudiait leur physionomie. Quels sont ceux qu’on a choisis pour l’expйdition de cette nuit? se disait-il. Dans cette famille, les souvenirs de la cour de Henri III sont si prйsents, si souvent rappelйs, que, se croyant outragйs, ils auront plus de dйcision que les autres personnages de leur rang. Il regarda Mlle de La Mole pour lire dans ses yeux les projets de sa famille; elle йtait pвle, et avait tout а fait une physionomie du moyen вge. Jamais il ne lui avait trouvй l’air si grand, elle йtait vraiment belle et imposante. Il en devint presque amoureux. Pallida morte futura, se dit-il (Sa pвleur annonce ses grands desseins).

 

En vain, aprиs dоner, il affecta de se promener longtemps dans le jardin, Mlle de La Mole n’y parut pas. Lui parler eыt, dans ce moment, dйlivrй son cњur d’un grand poids.

 

Pourquoi ne pas l’avouer? il avait peur. Comme il йtait rйsolu а agir, il s’abandonnait а ce sentiment sans vergogne. Pourvu qu’au moment d’agir, je me trouve le courage qu’il faut, se disait-il, qu’importe ce que je puis sentir en ce moment? Il alla reconnaоtre la situation et le poids de l’йchelle.

 

C’est un instrument, se dit-il riant, dont il est dans mon destin de me servir! ici comme а Verriиres. Quelle diffйrence! Alors, ajouta-t-il avec un soupir, je n’йtais pas obligй de me mйfier de la personne pour laquelle je m’exposais. Quelle diffйrence aussi dans le danger!

 

J’eusse йtй tuй dans les jardins de M. de Rкnal qu’il n’y avait point de dйshonneur pour moi. Facilement on eыt rendu ma mort inexplicable. Ici, quels rйcits abominables ne va-t-on pas faire dans les salons de l’hфtel de Chaulnes, de l’hфte de Caylus, de l’hфtel de Retz, etc., partout enfin. Je serai un monstre dans la postйritй.

 

Pendant deux ou trois ans, reprit-il en riant, et se moquant de soi. Mais cette idйe l’anйantissait. Et moi, oщ pourra-t-on me justifier? En supposant que Fouquй imprime mon pamphlet posthume, ce ne sera qu’une infamie de plus. Quoi! Je suis reзu dans une maison, et pour prix de l’hospitalitй que j’y reзois, des bontйs dont on m’y accable, j’imprime un pamphlet sur ce qui s’y passe! j’attaque l’honneur des femmes! Ah! mille fois plutфt, soyons dupes!

 

Cette soirйe fut affreuse.


Дата добавления: 2015-11-14; просмотров: 38 | Нарушение авторских прав


<== предыдущая страница | следующая страница ==>
Chapitre XIV. Pensйes d’une jeune fille| Chapitre XVI. Une heure du matin

mybiblioteka.su - 2015-2024 год. (0.011 сек.)